TRIBUNAL ADMINISTRATIF de LYON 

N° 9403515 - 9403516 
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PRÉFET DE L'ARDÈCHE 
c/ COMMUNE DE GLUIRAS 
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Monsieur CHARLIN 
Rapporteur 
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Monsieur STECK 
Commissaire du gouvernement 
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Séance du 14 février 1995 
Lecture du 7 mars 1995

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS 

 

Le tribunal administratif de LYON 

1ère chambre

composé de : 
Monsieur LOPEZ, président 
Messieurs CHARLIN et CLOT, conseillers, 
greffier : Monsieur SEGADO

 

rend le jugement suivant : 

 

FT

Objet : 01-04-03-03 : Validité des actes administratifs - principes généraux de droit - égalité des usagers devant le service public - discrimination injustifiée
16-05 Services publics municipaux
27 Eaux

 

LE LITIGE ET LA PROCÉDURE

1°) Par un déféré enregistré le 15 septembre 1994, sous le n° 9403515, le PRÉFET DE L'ARDÈCHE a demandé au tribunal de prononcer l'annulation, pour excès de pouvoir, des délibérations, en date des 1er avril et 29 août 1994, par lesquelles le conseil municipal de Gluiras (Ardèche) a décidé de cesser la distribution d'eau potable aux abonnés dont la propriété est située hors de la commune ;

2°) Par un déféré enregistré le 15 septembre 1994 sous le n° 9403516, le PRÉFET DE L'ARDÈCHE a demandé au tribunal de prononcer le sursis à exécution des délibérations susvisées en date des 1er avril et 29 août 1994 ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience publique qui a eu lieu le 14 février 1995 ;

Le Tribunal a examiné les délibérations ainsi que les mémoires et pièces produits par les parties avant la clôture de l'instruction ;

Il a entendu à l'audience publique :
- le rapport de Monsieur CHARLIN, conseiller,
- les observations de Monsieur RISSON, maire de la COMMUNE DE GLUIRAS,
- les conclusions de Monsieur STECK, commissaire du gouvernement ;

 

 

LA DÉCISION

Après en avoir délibéré dans la même formation que ci-dessus :

Au vu :
- de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 modifiée,
- du code des communes,
- du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986,
- des articles 1089 B et 1090 A du code général des impôts et de l'article 10 de la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977, complétés par l'article 44 de la loi de finances pour 1994,

 

Considérant que les déférés n° 9403515 et 9403516 présentés par le PRÉFET DE L'ARDÈCHE sont dirigés contre les mêmes délibérations et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

 

SUR LA RECEVABILITÉ DES DÉFÉRÉS :

Considérant que l'article 2-II de la loi du 2 mars 1982 modifiée par la loi du 22 juillet 1982, prévoit la transmission au représentant de l'État dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement, notamment, des "délibérations du conseil municipal", en vue de permettre audit représentant, en application de l'article 3 de la loi, de déférer à la juridiction administrative dans les deux mois de leur transmission celles de ces délibérations qu'il estime contraires à la légalité ; que l'obligation de transmission prévue par cet article 2 présente un caractère général et s'impose dès lors aux communes, quel que soit l'objet des délibérations de leur conseil municipal ; qu'il s'ensuit que le maire de Gluiras était tenu de transmettre au représentant de l'État la délibération, en date du 1er avril 1994, par laquelle le conseil municipal a modifié la réglementation applicable, en matière de raccordement, aux usagers du réseau d'eau potable exploité par la commune ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la délibération du 1er avril 1994 n'a pas été transmise au PRÉFET DE L'ARDÈCHE ; que, par suite, le délai de recours contentieux n'a pu, comme le soutient le maire de Gluiras, courir, à compter de cette date, à l'encontre de cet acte ; que le préfet n'en a eu connaissance que le 28 juillet 1994 ; qu'ainsi, à la date de leur enregistrement au greffe le tribunal administratif de Lyon, le 15 septembre 1994, les déférés du préfet n'étaient pas, en tout état de cause, tardifs en ce qui concerne cette délibération ;

 

SUR LA LÉGALITÉ DES DÉLIBÉRATIONS ATTAQUÉES :

Considérant que, par une délibération du 1er avril 1994, confirmée le 29 août 1994, le conseil municipal de Gluiras a décidé de "cesser toute distribution en direction d'abonnés éventuels habitant hors de la commune" ;

Considérant que les personnes qui sont raccordées à un réseau d'eau potable appartenant à une commune ont la qualité d'usager du service public dont l'objet est d'exploiter le réseau et doivent être regardées comme étant, vis à vis de ce service, dans la même situation, alors même que le point où l'eau leur est distribuée n'est pas située sur le territoire de cette commune ;

Considérant que la décision ci-dessus mentionnée du conseil municipal de Gluiras crée, aux dépens des usagers de son service de distribution d'eau dont l'immeuble n'est pas situé dans la commune, une discrimination qu'aucune contrainte technique ni considération d'intérêt général ne justifient ; qu'il appartient en effet à la COMMUNE DE GLUIRAS de répartir également entre les usagers du service les contraintes inhérentes à l'insuffisance de la ressources en eau dont fait état la délibération contestées ; qu'il s'ensuit que le PRÉFET DE L'ARDÈCHE est fondé à soutenir que cette délibération méconnaît le principe d'égalité des usagers ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'en prononcer l'annulation ;

 

SUR LE SURSIS À EXÉCUTION :

Considérant que la présente décision ayant tranché au fond le litige qui oppose le PRÉFET DE L'ARDÈCHE à la COMMUNE DE GLUIRAS, le déféré tendant à ce que soit prononcé le sursis à exécution des décisions attaquées se trouve dépourvu d'objet ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer ;

 

 

LE TRIBUNAL DÉCIDE :

Art 1 : les délibérations du conseil municipal de Gluiras, en date des 1er avril et 29 août 1994, sont annulées

Art 2 : il n'y a pas lieu de statuer sur le déféré n° 9403516 du PRÉFET DE L'ARDÈCHE

Art 3 : le présent jugement sera notifié conformément aux dispositions de l'article R 211 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel

 

Lu en séance publique, le sept mars mil neuf cent quatre vingt quinze.

La République mande et ordonne au PRÉFET DE L'ARDÈCHE, en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.