AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

TRIBUNAL D'INSTANCE DE METZ

JUGEMENT DU 3 MAI 2002

 

N° RG 11-2001-3812

 

PARTIE DEMANDERESSE :

COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE)
103 rue aux Arènes
BP 60 045
57 003 METZ CEDEX 01
représentée par Maître SOUMAN, avocat au barreau de THIONVILLE

 

PARTIE DÉFENDERESSE :

Monsieur Aimé X...
représenté par Maîtres ROTH & PAUL, avocat au barreau de METZ

 

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU PRONONCÉ :

JUGE : Monsieur L. NAJEM
GREFFIER : Mlle S. BISCEGLIA

Débats à l'audience publique du 19 mars 2002

 

 

 

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte d'huissier en date du 4 décembre 2001, la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) a fait assigner Monsieur Aimé X... devant le Tribunal d'Instance de METZ.

Elle sollicite sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :
244,01 euros à titre principal avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
61 euros au titre de la majoration de 25 % avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
121,96 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle allègue :
- que Monsieur Aimé X... qui demeure à MALANCOURT, annexe de la commune d'AMNEVILLE, a été destinataire de factures relatives à la taxe d'assainissement qu'elle recouvre pour le compte du Syndicat Intercommunal d'Assainissement de la Vallée de l'Orne (SIAVO) ;
- que ces factures n'ont pas été payées ;
- que les eaux usées des habitants de MALANCOURT sont évacuées en transitant par le bassin d'orage appartenant au SIAVO situé rue de la Potence à MALANCOURT et par un collecteur reliant le bassin d'orage au réseau de ROMBAS ; que le collecteur comme le bassin d'orage constituent un service d'assainissement financé par le SIAVO ;
- que la partie défenderesse bénéficie d'un réseau d'évacuation des eaux usées qu'elle génère ;
- qu'il existe une délibération du SIAVO instituant une redevance d'assainissement ; que de telles délibérations constituent des actes administratifs qui s'imposent au juge judiciaire ;
- que ladite décision est licite au regard des dispositions du Code Général des Collectivités Territoriales ;
- que le Tribunal Administratif a jugé que la décision du Comité Directeur n'était pas entachée d'illégalité ; que la Cour de Cassation a estimé que la taxe était due au motif que tout service chargé en tout ou partie de la collecte, du transport ou de l'épuration des eaux usées constitue un service d'assainissement ;
- que le débat sur le service rendu a déjà été tranché par la Cour de Cassation ;
- qu'en outre, l'article R. 2333-130 du Code Général des Collectivités Territoriales prévoit que le non paiement de la redevance dans un délai de 3 mois à compter de la présentation de la facture emporte une majoration de 25 % de la redevance ;
- qu'elle justifie des améliorations effectuées par un contrat pluriannuel.

Monsieur Aimé X... conclut au débouté de l'ensemble des demandes de la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) et à sa condamnation à lui payer la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La partie défenderesse allègue :
- que la demanderesse provoque des confusions terminologiques ;
- qu'une taxe n'est pas une redevance, et une redevance n'est pas une surtaxe ;
- que constitue une taxe, un prélèvement effectué de manière unilatérale sur un redevable au titre de sa contribution au financement d'un ou plusieurs services ;
- que constitue une redevance la rémunération d'un service ;
- que la surtaxe est instituée uniquement dans le cas où le service de l'eau est exploité en affermage ; qu'elle constitue un élément constitutif du prix de l'eau correspondant à la part de l'eau correspondant à la part d'investissement dans le coût global du produit distribué par un service et réparti entre les usagers ;
- que le contentieux ne porte que sur le bien-fondé de cette surtaxe d'assainissement et non sur la redevance ou la taxe de raccordement qui ne sont pas synonymes ;
- qu'il appartient bien au juge judiciaire d'apprécier si les conditions fixées par la délibération du 23 novembre 1990 du SIAVO pour l'exigibilité de cette surtaxe sont satisfaites ; que le Tribunal Administratif ne s'est borné qu'à statuer sur la légalité de l'institution d'une surtaxe ;
- que cette délibération institue une surtaxe et non une redevance d'assainissement ; que la surtaxe, contrairement à la redevance, n'est due que s'il est établi et justifié que le produit reçu sur l'usager au titre de cette surtaxe a réellement été affecté à l'amélioration et au fonctionnement de la station d'épuration ;
- que les factures émises ne portent nulle mention de cette contrepartie ; qu'il n'est pas démontré que cette station ait fait l'objet d'une quelconque amélioration ;
- que le contrat pluriannuel versé aux débats ne constitue qu'un programme et non un bilan ; qu'il ne prévoit pas de travaux relatifs à l'amélioration de la station ; que c'est pourtant pour l'amélioration de la station que la surtaxe par mètre cube a été instituée.

 

 

DISCUSSION :

Sur la demande principale :

Il résulte de l'extrait du registre des délibérations du Comité Directeur du Syndicat Intercommunal d'Assainissement de la Vallée de l'Orne (SIEGVO) en date du 21 novembre 1990 que ce dernier a décidé de créer une surtaxe d'assainissement syndicale à compter du 1er janvier 1991. Cette surtaxe a été fixée à 0,80 F par m3.

Cette délibération prévoit expressément que la surtaxe a été instituée pour améliorer le fonctionnement de la station d'épuration.

Par délibération en date du 26 novembre 1996, cette surtaxe a été portée à 1,30 F à compter du 1er janvier 1997.

Aux termes de l'article L. 2224-7 du Code Général des Collectivités Territoriales, tout service chargé en tout ou partie de la collecte, du transport ou de l'épuration des eaux usées constitue un service d'assainissement.

Il est constant qu'il existe bien, en l'espèce, un réseau dans la mesure où les eaux usées font l'objet d'une évacuation et qu'à ce titre, une redevance d'assainissement, est nécessairement exigible.

Cependant, le présent litige ne porte pas sur l'exigibilité de la redevance d'assainissement qui apparaît en tant que telle sur les factures établies par le Syndicat Intercommunal des Eaux de Gravelotte et de la Vallée de l'Orne mais sur celle de la surtaxe d'assainissement, réclamée cette fois par la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE).

Cette surtaxe est elle aussi un élément constitutif du prix de l'eau correspondant à un investissement. Elle ne présente par de caractère fiscal et doit donc répondre, de la même façon que la redevance à laquelle elle vient s'ajouter, à un service effectivement rendu et dont elle n'est que la contrepartie.

La demanderesse ne peut donc, pour réclamer une somme quelconque à raison de cette surtaxe d'assainissement, se contenter de se prévaloir du service rendu par l'existence d'un réseau permettant l'écoulement des eaux usées puisque ce dernier fait déjà l'objet d'une redevance.

La partie défenderesse justifie d'ailleurs de l'existence de cette redevance d'assainissement (tarif : 1,15 F HT) par un exemplaire d'une facture du SIEGVO et adressée à Monsieur SALGADO pour la période du 20 mai 2000 au 20 septembre 2000. Pour la période du 29 avril au 20 septembre 2000, la demanderesse a adressé sa propre facture à Monsieur SALGADO mais cette fois au titre de la surtaxe (tarif : 1,50 F HT).

La demanderesse n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'identité de ces deux perceptions.

Le Tribunal Administratif de Strasbourg, dans un jugement en date du 3 avril 2001 a, certes, rejeté l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre de la délibération du Comité Directeur qui a institué cette surtaxe mais l'objet du présent litige n'est nullement celui de la légalité de la surtaxe mais bien de son exigibilité dans le cas d'espèce.

Il appartient donc à la demanderesse de démontrer précisément l'existence du service rendu qui, seul, est de nature à rendre exigible la surtaxe d'assainissement.

La COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) verse aux débats un Contrat Pluriannuel d'Assainissement conclu entre l'Agence de l'eau Rhin Meuse, le département de la Moselle et le Syndicat Intercommunal d'Assainissement de la Vallée de l'Orne.

Il résulte de l'article 2 de ce contrat qu'un programme de travaux a été établi pour un coût total de 77 108 000 F HT.

Il n'est cependant produit aucune pièce qui serait de nature à prouver la réalisation effective des travaux ainsi envisagés ou mêmes d'autres réalisations en amont du réseau.

La COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) ne démontre donc pas l'amélioration du fonctionnement de la station d'épuration qui constituait pourtant la contrepartie de l'établissement de la surtaxe d'assainissement, telle qu'elle a été instituée par la délibération en date du 23 novembre 1990.

Dès lors, la preuve du service rendu, et donc de l'exigibilité de la surtaxe litigieuse, n'est nullement rapportée.

La demanderesse sera déboutée de sa demande principale.

 

Sur la majoration:

Aux termes de l'article R. 2333-130 du Code Général des Collectivités Territoriales, à défaut de paiement dans le délai de trois mois à compter de la présentation de la quittance et dans les quinze jours d'une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la redevance est majorée de 25 %.

En l'espèce, la demanderesse a été déboutée de ses demandes au titre de la surtaxe. Elle ne peut donc prétendre à une quelconque majoration.

Elle sera déboutée de ses demandes à ce titre.

 

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Aimé X... les frais non compris dans les dépens. La COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) sera condamnée à lui payer la somme de 5 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

Sur les dépens :

La COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE), partie succombante, sera condamnée aux dépens.

 

 

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

- DÉBOUTE la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) de l'ensemble de ses demandes ;

- CONDAMNE la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) à payer à Monsieur Aimé X... la somme de 5 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- CONDAMNE la COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX (CGE) aux dépens ;

- DÉBOUTE les parties de l'ensemble de leurs autres demandes.

 

Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an sus-indiqués.

(...)