COUR D'APPEL DE NIMES
RÉFÉRÉS

ORDONNANCE N° 99/605
AFFAIRE N° 98/00700

SNC CISE
c/
ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DE LA FONTAULIÈRE, Monsieur Michel X...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

 

 

 

 AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

 

ORDONNANCE RENDUE LE VINGT DEUX JANVIER MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX NEUF

 

A l'audience publique des RÉFÉRÉS de la COUR D'APPEL DE NIMES du VINGT NOVEMBRE MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX HUIT,

Nous, Monsieur ROCHE, Président de la Chambre à la Cour d'Appel de NIMES, siégeant en l'empêchement légitime de Monsieur le Premier Président et ce conformément à son ordonnance du 6 juillet 1998,

Assisté de Madame BERNARD, Greffier,

Après avoir entendu en leurs conclusions et plaidoiries les représentants des parties, dans la procédure introduite

 

PAR :
La SNC COMPAGNIE DE SERVICES ET D'ENVIRONNEMENT par abréviation CISE, poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social
36/38 Rue de la Princesse à LOUVECIENNES (78 430)

Représentée par la SCP SIRAT - GILLI (Avocats au Barreau de PARIS)
Assistée de Me TARDIEU (Avoué à la Cour)
DEMANDERESSE

 

CONTRE :
ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DE LA FONTAULIÈRE domiciliée à PONT DE LABEAUME (07 380)

Monsieur Michel X...

Représentés par Maître NGUYEN (Avocat au Barreau de Lyon)
DÉFENDEURS

Avons fixé le prononcé au 22 janvier 1999 et en avons ensuite délibéré conformément à la loi ;

 

Par jugement du 15 septembre 1998 le Tribunal d'Instance de LARGENTIÈRE a, dans l'instance opposant la SNC Compagnie de Service et d'Environnement (CISE) demanderesse en paiement de factures à l'Association des Consommateurs de la Fontaulière (ACF) et Monsieur Michel X..., sursis à statuer jusqu'à ce que le Tribunal Administratif se soit prononcé sur les exceptions préjudicielles tirées de l'illégalité du cahier des charges pour l'exploitation par affermage des services de distribution d'eau potable et de la nullité de certains avenants au contrat d'affermage ;

Par acte extra judiciaire du 06 octobre 1998, la CISE a sollicité d'être autorisée à interjeter appel de ce jugement aux motifs :
- que le refus par les abonnés d'acquitter leurs redevances serait de nature à porter atteinte "à la continuité d'un service public vital",
- que l'importance des impayés depuis 1993, environ 20 millions de francs, met en péril l'équilibre financier de la CISE,
- que le contrat d'abonnement liant l'abonné au fermier ne contiendrait aucune clause exorbitante du droit commun,
- que la validité du contrat d'affermage étant sans incidence sur les contrats d'abonnement, la question de son éventuelle nullité ne saurait constituer une question préjudicielle ;

Les défendeurs ont conclu au rejet de la demande en reprenant leur argumentation de fond quant à l'exception préjudicielle et en soutenant que la CISE ne justifierait nullement d'un motif grave et légitime susceptible de la voir autorisée à relever appel du jugement dans la mesure où, par delà l'ensemble du contentieux qui oppose les parties quant à la capacité à agir du demandeur en paiement, celui-ci ne justifierait pas de ce que la décision du tribunal, dans sa relation à la situation de fait, aurait un caractère de gravité mettant en péril son équilibre financier et, par voie de conséquence, le service de distribution d'eau.

Les défendeurs ont respectivement sollicité le bénéfice de 1 000 et 2 000 francs sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;

 

 

SUR QUOI

Il n'appartient qu'aux juridictions administratives de se prononcer sur la légalité des actes Administratifs, la validité ou la nullité des contrats de droit public ;

La juridiction de l'ordre judiciaire a, dés lors, l'obligation de surseoir à statuer en présence d'une exception tenant, en l'espèce, à l'éventuelle illégalité du cahier des charges pour l'exploitation par affermage des services de distribution publique d'eau potable, sous la réserve que l'exception présente un caractère sérieux conditionnant la solution au fond du litige ;

S'il est exact que les abonnés ne sont pas partie au contrat d'affermage et que le défendeur est débiteur du prix de l'eau qu'il consomme en vertu du contrat de droit privé d'abonnement, il n'en demeure pas moins que l'exécution du contrat de droit privé est tributaire ou soumise aux dispositions du contrat de droit public en ce que celui-ci impose à l'abonné des obligations, certaines sous la forme de taxes, auxquelles il ne peut se soustraire dans la mesure incontestable où le cahier des charges est réglementairement opposable à l'abonné qui, faute de ne pas y être admis, ne pourrait en discuter les clauses impérieuses et régaliennes auxquelles il est cependant assujetti.

De  ce fait, la question préjudicielle soumise au premier juge est nécessairement liée à la solution du litige au fond dans la mesure où, si l'illégalité ou la nullité du contrat d'affermage devait être prononcée, la CISE perdrait en droit toute capacité à agir ;

Quant au trouble illicite que constituerait pour celle-ci la volonté concertée et collective de nombre d'usagers se refusant à acquitter les sommes réclamées et le préjudice financier qui en est la conséquence pour le fermier, force est de constater que celui-ci, qui avait primitivement fixé dans son assignation sa perte financière à 20 millions, l'a ensuite ramenée à environ 11 millions, alors même qu'il n'est pas démontré pour autant, en l'état d'une somme d'environ 4 millions volontairement consignée par les abonnés entre les mains d'un Officier ministériel, que l'équilibre financier de la CISE serait en péril, d'une part, d'autre part qu'elle serait empêchée d'investir dans des équipements urgents et coûteux qui ne sont pas démontrés en l'état, dans la mesure où la charge de ceux-ci incombe au Syndicat affermant ;

Mais attendu cependant qu'il est du plus grand intérêt qu'il soit statué ou prononcé à nouveau sur la capacité de l'abonné à contester la validité du contrat de droit public alors même que la collectivité des abonnés constitués en association de consommateurs ne pouvait, sans déroger aux principes du droit commun, s'arroger la liberté de cesser de payer son abonnement et de consigner dans de faibles proportions par rapport au montant de la réclamation, sans y avoir été préalablement autorisée par décision de justice, qu'il s'ensuit que la CISE justifie d'un motif grave et légitime la fondant à obtenir d'être autorisée à frapper d'appel les décisions de première instance ayant sursis à statuer sur ses demandes en paiement ;

 

 

PAR CES MOTIFS

Nous, P.H. ROCHE, statuant publiquement, en matière de référé et contradictoirement,

Disons la COMPAGNIE DE SERVICES ET D'ENVIRONNEMENT (CISE) recevable et fondée en sa demande ;

L'autorisons à relever appel du jugement prononcé par le T.I. LARGENTIERE le 15 septembre 1998 dans l'instance l'opposant à ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DE LA FONTAULIERE, Monsieur Michel X... ;

Fixons l'affaire à l'audience de la 2ème Chambre de la Cour de ce siège Section A, le 30 septembre 1999 à 9 heures.

Réservons les dépens pour être joints au fond ;

Ordonnance signée par Monsieur ROCHE, Président, et par Madame BERNARD, Greffier.