TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE GRENOBLE

N° 9803750, 9803751, 9804291 et 9804292
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Association A.G.I.R. Saint-Gervais et préfet de la Savoie contre
commune de Saint-Gervais-les-Bains
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Monsieur Berthet-Fouqué, rapporteur
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Monsieur Cau, commissaire du gouvernement
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Audience du 10 mars 1999
Lecture du 17 mars 1999
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Classement : 135-02-03-03-04 et 135-02-03-03-05

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

Le Tribunal administratif de Grenoble
(1° chambre)

 

Vu 1° la requête enregistrée le 27 août 1998 sous le numéro 9803750, présentée par Me Deygas pour l'Association pour la Garantie des Intérêts des Résidents de Saint-Gervais (dénommée ci-après : l'association A.G.I.R. Saint-Gervais), dont le siège est situé l'Alpenrose 400/430 route de la Mollaz, 74 170 Saint-Gervais-les-Bains, représentée par son président ; l'association A.G.I.R. Saint-Gervais demande que le Tribunal :
- annule les délibérations n° 16 et 17 adoptées le 30 juin 1998 par le conseil municipal de la commune de Saint-Gervais-les-Bains
- enjoigne à cette commune de prendre, dans les 2 mois et sous astreinte de 2 000 F par jour de retard, une nouvelle délibération relative au règlement local de l'eau et de l'assainissement
- condamne la commune à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
l'association A.G.I.R. Saint-Gervais soutient,
- en ce qui concerne à la fois les délibérations n° 16 et 17, que la commission consultative des usagers des services publics locaux n'a pas été consultée avant leur adoption ; que le maire a écarté les membres de l'association la représentant dans cette commission des informations indispensables à l'exercice de leur mission ; que les conseillers municipaux n'ont pas été suffisamment informés avant le conseil ;
- en ce qui concerne la délibération n° 16, qu'elle contrevient à la loi sur l'eau, au principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques et entre les usagers du service public, à l'ordonnance du 1er décembre 1986, au jugement du Tribunal en date du 29 avril 1998 et à la circulaire préfectorale du 3 juin 1998 ;
- en ce qui concerne la délibération n° 17, qu'elle est entachée des mêmes vices que la n° 16, et qu'elle contrevient au code des communes ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu le mémoire enregistré le 2 octobre 1998, présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, représentée par son maire ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut au rejet de la requête ; elle soutient que la consultation de la commission consultative des usagers des services publics locaux n'était pas obligatoire en l'espèce ; que le moyen tiré de ce que le maire aurait écarté de toute information les membres de cette commission est inopérant ; que l'obligation d'information des conseillers municipaux a été respectée ; qu'elle s'est conformée à la jurisprudence administrative ; que la délibération n° 16 ne contrevient ni à la loi sur l'eau, ni au principe d'égalité entre les citoyens et entre les usagers du service public ; que le moyen tiré de l'ordonnance du 1er décembre 1986 est inopérant ; que la délibération n° 17 ne méconnaît pas le code des communes ; que la circulaire préfectorale n'est pas invocable ;

Vu le mémoire enregistré le 22 octobre 1998, présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut en outre à la condamnation de l'association A.G.I.R. Saint-Gervais à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et à lui rembourser les droits de plaidoiries ;

Vu le mémoire enregistré le 13 février 1999, présenté par Me Deygas pour l'association A.G.I.R. Saint-Gervais qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 25 février 1999 présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes productions, par les mêmes moyens ;

 

Vu 2° la requête enregistrée le 27 août 1998 sous le n° 9803751, présentée par Me Deygas pour l'association A.G.I.R. Saint-Gervais, représentée par son président ; l'association A.G.I.R. Saint-Gervais demande que le Tribunal
- annule les délibérations n° 18, 19, 20 et 21 adoptées le 30 juin 1998 par le conseil municipal de la commune de Saint-Gervais-les-Bains
- enjoigne à cette commune de prendre, dans les 2 mois et sous astreinte de 2 000 F par jour de retard, une nouvelle délibération relative aux tarifications de l'eau et de l'assainissement
- éventuellement, désigne un expert pour déterminer le juste prix de l'eau
- condamne la commune à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
l'association A.G.I.R. Saint-Gervais soutient
- en ce qui concerne à la fois les délibérations n° 18, 19, 20 et 21, que la commission consultative des usagers des services publics locaux n'a pas été consultée avant leur adoption ; que le maire a écarté les membres de l'association la représentant dans cette commission des informations indispensables à l'exercice de leur mission ; que les conseillers municipaux n'ont pas été suffisamment informés avant le conseil ; que les informations leur ont été présentées de manière fallacieuse ; que les délibérations présentent des imprécisions terminologiques ;
- en ce qui concerne la délibération n° 18, qu'elle contrevient à la loi sur l'eau, au principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques et entre les usagers du service public, à l'ordonnance du 1er décembre 1986, au jugement du Tribunal en date du 29 avril 1998 et à la circulaire préfectorale du 3 juin 1998 ; que l'eau est vendue à perte à certains consommateurs ; que la tarification est incomplète car limitée aux usages domestiques et industriels ;
- en ce qui concerne la délibération n° 19, outre les moyens développés au sujet de la délibération n° 18, qu'elle ne prévoit aucun droit de branchement ni forfait construction, à la différence de la n° 18 ;
- en ce qui concerne la délibération n° 20, outre les moyens développés au sujet de la délibération n° 18, qu'elle contrevient au code des communes ;
- en ce qui concerne la délibération n° 21, les mêmes moyens que ceux qu'elle développe au sujet de la délibération n° 20 ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu le mémoire enregistré le 3 octobre 1998, présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, représentée par son maire ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut au rejet de la requête ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains soutient que la consultation de la commission consultative des usagers des services publics locaux n'était pas obligatoire en l'espèce ; que le moyen tiré de ce que le maire aurait écarté de toute information les membres de cette commission est inopérant ; que l'obligation d'information des conseillers municipaux a été respectée ; que le moyen tiré de la présentation fallacieuse des informations aux conseillers municipaux doit être reputé manquant en fait ; que celui tiré d'imprécisions terminologiques est inopérant et non fondé ; que les délibérations attaquées ne méconnaissent ni la jurisprudence administrative, ni la loi sur l'eau, ni le principe d'égalité entre les citoyens et entre les usagers du service public ; que le moyen tiré de l'ordonnance du 1er décembre 1986 est inopérant ; que les délibérations ne contreviennent pas au code des communes ; que le moyen tiré de la vente à perte est inopérant et injustifié ; que celui tiré de l'incomplétude de la tarification manque en fait ;

Vu le mémoire enregistré le 22 octobre 1998, présenté pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire, par les mêmes moyens ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut en outre à la condamnation de l'association A.G.I.R. Saint-Gervais à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et à lui rembourser les droits de plaidoiries ;

Vu le mémoire enregistré le 25 février 1999 présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes productions, par les mêmes moyens ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut en outre à ce que les frais de l'expertise qui serait ordonnée soient mis à la charge de l'association requérante ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains soutient en outre que le moyen relatif à la vente à perte est sans pertinence ;

 

Vu 3° le déféré enregistré le 19 octobre 1998 sous le n° 9804291, présenté par le préfet de la Haute-Savoie, qui demande que le Tribunal annule les délibérations N° 17, 20 et 21 adoptées le 30 juin 1998 par le conseil municipal de la commune de Saint-Gervais-les-Bains ; le préfet de la Haute-Savoie soutient que la délibération contrevient à la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau et au principe d'égalité entre les usagers du service public ; que ces vices entachent d'illégalité les délibérations n° 20 et 21 ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu le mémoire enregistré le 17 novembre 1998, présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, représentée par son maire ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut au rejet du déféré ; elle soutient que la délibération n° 17 ne contrevient ni à la loi sur l'eau, ni au principe d'égalité entre les usagers du service public ;

 

Vu 4° le déféré enregistré le 19 octobre 1998 sous le n° 9804292, présenté par le préfet de la Haute-Savoie, qui demande que le Tribunal annule les délibérations n° 16, 18 et 19 adoptées le 30 juin 1998 par le conseil municipal de la commune de Saint-Gervais-les-Bains ; le préfet de la Haute-Savoie soutient que la délibération n° 16 contrevient à la loi sur l'eau, ce qui entache d'illégalité les délibérations n° 18 et 19 prises sur le fondement de la n° 16 ; que ces tarifications méconnaissent le principe d'égalité entre les usagers du service public ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu le mémoire enregistré le 17 novembre 1998, présenté par Me Mescheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, représentée par son maire ; la commune de Saint-Gervais-les-Bains conclut au rejet du déféré ; elle soutient que la délibération n° 16 ne contrevient pas à la loi sur l'eau ; que les différences de traitement instituées par la délibération n° 19 est justifiée par la différence de situation ;

 

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des communes ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ;

Vu la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau ;

Vu la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

 

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 1999 :
- le rapport de Monsieur Berthet-Fouqué, conseiller ;
- les observations de Me Cottin, substituant Me Deygas pour l'association A.G.I.R. Saint-Gervais, et de Me Descheriakoff pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains ;
- et les conclusions de Monsieur Cau, commissaire du gouvernement ;

 

Considérant que les requêtes et déférés susvisés présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

 

Sur les conclusions tendant à l'annulation des délibérations attaquées :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant qu'il ressort de ses écritures qu'en se prévalant du défaut de saisine pour avis de la commission consultative des usagers des services publics locaux créée en vertu de la loi susvisée du 6 février 1992, l'association A.G.I.R. Saint-Gervais entend invoquer l'article L. 322-2 du code des communes, issu de l'article 26 de cette loi et devenu l'article L. 2143-4 du code général des collectivités territoriales, aux termes duquel : "Il est créé une commission consultative compétente pour un ou plusieurs services publics locaux exploités en régie ou dans le cadre d'une convention de gestion déléguée. Elle doit comprendre parmi ses membres des représentants d'associations d'usagers du ou des services concernés. Elle est présidée par le maire. Cette obligation ne s'applique qu'aux services des communes de plus de 3 500 habitants" ;

Considérant que, si ces dispositions prescrivent la création d'au moins une commission consultative et certaines modalités de sa composition, elles ne précisent pas, en revanche, les modalités de sa consultation, qui ne peut, dans ces conditions, être considérée comme obligatoire ; que le moyen tiré par l'association A.G.I.R. Saint-Gervais du défaut de consultation est, dès lors, inopérant ; qu'il est constant que la commission consultative des usagers des services publics locaux n'a pas été consultée avant l'adoption de la délibération ; que, dès lors, la circonstance que le maire n'aurait pas communiqué aux représentants de l'association A.G.I.R. Saint-Gervais dans cette commission des informations indispensables à l'exercice de leur mission, est, à la supposer établie, sans influence sur la légalité de la délibération ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : "Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération" ;

Considérant que l'association A.G.I.R. Saint-Gervais soutient que les conseillers municipaux n'ont pas été suffisamment et objectivement informés avant le conseil, en particulier parce qu'ils n'ont pas reçu communication préalable de la circulaire par laquelle le préfet a fait part aux maires des motifs d'un jugement du Tribunal ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la communication, qui n'est pas obligatoire, de cette circulaire, ou de toute autre pièce d'information relative aux délibérations, aurait été refusée à un ou des conseillers municipaux, l'ayant demandée ; qu'au surplus, figurait à l'ordre du jour du même conseil municipal une délibération, numérotée 28 et ayant pour objet d'autoriser le maire à faire appel du jugement susmentionné, qui en indique les motifs ; que le moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;

Considérant que le caractère fallacieux de la présentation des informations aux conseillers municipaux n'est pas établi ; que le moyen correspondant ne peut, par suite, qu'être écarté ;

Considérant que l'absence de mention de la définition de termes employés dans les délibérations n'est pas de nature à affecter la légalité de celles-ci ; qu'à supposer que cette absence serait susceptible de créer un doute sur l'exacte application desdites délibérations à des situations individuelles, cette circonstance serait sans influence sur leur légalité ; que le moyen correspondant est donc inopérant ;

 

En ce qui concerne la légalité interne des délibérations n° 16, 18 et 19 :

Considérant que la délibération n° 16 a pour objet de réviser le règlement local de l'eau de la commune de Saint-Gervais-les-Bains, par la modification de l'article 5, la création d'un article 5 bis, et l'abrogation de l'article 32 ; que les moyens de légalité interne développés par l'association A.G.I.R. Saint-Gervais et par le préfet ne concernent que l'article 5 bis, relatif aux caractéristiques du branchement et à leur prise en compte dans les modalités de facturation de l'eau ;

Considérant que les délibérations n° 18 et 19 ont pour objet de fixer la tarification domestique -n° 18) et industrielle (n° 19) de l'eau pour la période de consommation du 1er juillet 1998 au 30 juin 1999 ; qu'outre un montant calculé en fonction du volume réellement consommé, cette tarification inclut "une partie fixe par branchement qui est calculée en tenant compte des charges fixes et des caractéristiques du branchement telles qu'elles sont définies dans l'article 5 bis du règlement de l'eau : 425,00 francs H.T." ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa du II, dans sa rédaction applicable en l'espèce, de l'article 13 de la loi susvisée du 3 janvier 1992 : "(...) toute facture d'eau comprendra un montant calculé en fonction du volume réellement consommé par l'abonné à un service de distribution d'eau et pourra, en outre, comprendre un montant calculé indépendamment de ce volume, compte tenu des charges fixes du service et des caractéristiques du branchement" ;

Considérant qu'il ressort notamment de ces dispositions que les modalités de calcul de la partie fixe facultative du prix facturé à l'abonné à un service de distribution d'eau peuvent tenir compte des caractéristiques du branchement ; qu'il ressort notamment des travaux préparatoires de la loi susvisée du 3 janvier 1992 que, par caractéristiques du branchement, il convient d'entendre des éléments inhérents au branchement qui, sans entrer dans les charges fixes du service, ont une incidence sur le prix de revient de celui-ci ;

Considérant que le nombre d'unités d'habitation ou de locaux desservis par un même branchement ne constitue pas, au sens des dispositions précitées de la loi susvisée du 3 janvier 1992, une des caractéristiques de ce branchement ; qu'il suit de là qu'en en tenant compte pour la facturation, la commune de Saint-Gervais-les-Bains a méconnu lesdites dispositions ; que, cet élément étant indissociable du reste de la détermination des caractéristiques du branchement par l'article 5 bis du règlement local de l'eau de cette commune, la délibération n° 16 qui crée cet article est de ce fait entachée d'erreur de droit, et doit dans cette mesure être annulée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés à son endroit ;

Considérant que les délibérations n° 18 et 19 qui sont fondées sur l'article 5 bis susmentionné, sont par voie de conséquence illégales et doivent, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés à leur endroit, être annulées ;

 

En ce qui concerne la légalité interne des délibérations n° 17, 20 et 21 :

Considérant que la délibération n° 17 a pour objet de modifier l'article 15, relatif à la redevance d'assainissement, du règlement local de l'assainissement ; qu'il ressort des dispositions ainsi modifiées que cette redevance est composée d'une partie variable en fonction du volume d'eau prélevé, et d'une partie fixe déterminée selon les caractéristiques du branchement ;

Considérant que les délibérations n° 20 et 21 ont pour objet de fixer la tarification domestique (n° 20) et industrielle (n° 21) de l'assainissement pour la période de consommation du 1er juillet 1998 au 30 juin 1999 ; qu'outre un montant calculé en fonction du volume réellement consommé, cette tarification inclut "une partie fixe qui est calculée en tenant compte des charges fixes et des caractéristiques du branchement telles qu'elles sont définies dans l'article 15 [n°20] et 17 [n° 21] du règlement de l'assainissement : 482,00 francs H.T." ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 372-8 du code des communes : "La redevance d'assainissement est assise sur le volume d'eau prélevé par l'usager du service d'assainissement sur le réseau public de distribution ou sur toute autre source" ; et qu'aux termes de l'article R. 372-9 du même code : "Lorsque l'usager est alimenté par un service de distribution, la redevance correspondante est assise sur le nombre de mètres cubes d'eau réellement prélevé ou, le cas échéant, sur le forfait facturé" ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'assiette de la redevance d'assainissement intègre d'autres éléments que le volume d'eau prélevé, réel ou forfaitisé ; qu'en instituant en outre la partie fixe susmentionnée, la commune a donc méconnu lesdites dispositions ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés à leur endroit par le requérants, les délibérations n° 17, 20 et 21 sont entachées d'erreur de droit et doivent être annulées ;

 

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 8-2 et L. 8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public doit à nouveau prendre une décision après une nouvelle instruction, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit par le même jugement ou le même arrêt que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé" ;

Considérant que le présent jugement implique nécessairement que la commune de Saint-Gervais-les-Bains détermine à nouveau les caractéristiques du branchement définies par l'article 5 bis de son règlement local de l'eau et l'article 15 de son règlement local de l'assainissement, ainsi que les tarifications de l'eau et de l'assainissement qui procèdent respectivement de ces deux articles ; que ces décisions devront intervenir dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement à la commune de Saint-Gervais-les-Bains ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Saisi de conclusions en ce sens, le tribunal ou la cour peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application de l'article L. 8-2 d'une astreinte (...)" ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer envers la commune de Saint-Gervais-les-Bains une astreinte de 500 F par jour de retard dans l'exécution de l'injonction édictée ci-dessus ;

 

Sur les conclusions tendant à la désignation d'un expert :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ces conclusions ;

 

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le Tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Saint-Gervais-les-Bains doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Saint-Gervais-les-Bains à payer à l'association A.G.I.R. Saint-Gervais une somme de 2 000 F au titre des frais exposés par celle-ci ;

 

DÉCIDE :

Article 1er : La délibération n° 16, adoptée le 30 juin 1998 par le conseil municipal de la commune de Saint-Gervais-les-Bains, est annulée en tant qu'elle crée, dans le règlement local de l'eau de cette commune, un article 5 bis relatif aux caractéristiques du branchement et à leur prise en compte dans les modalités de facturation de l'eau.

Article 2 : Les délibérations n° 17, 18, 19, 20 et 21 , adoptées le 30 juin 1998 par le conseil municipal de la commune de Saint-Gervais-les-Bains, sont annulées.

Article 3 : La commune de Saint-Gervais-les-Bains déterminera à nouveau les caractéristiques du branchement définies par l'article 5 bis de son règlement local de l'eau et l'article 15 de son règlement local de l'assainissement, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement à cette commune, sous astreinte de cinq cents francs (500 F) par jour de retard.

Article 4 : La commune de Saint-Gervais-les-Bains versera à l'association A.G.I.R. Saint-Gervais une somme de deux mille francs (2 000 F) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent jugement sera notifié à l'association A.G.I.R. Saint-Gervais, au préfet de la Haute-Savoie et à la commune de Saint-Gervais-les-Bains.

 

Délibéré à l'issue de l'audience du 10 mars 1999, où siégeaient :

Monsieur Giltard, président
Monsieur Jayet, premier conseiller
Monsieur Berthet-Fouqué, conseiller

Prononcé en audience publique le 17 mars 1999.

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Savoie en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.