TRIBUNAL ADMINISTRATIF 
DE MARSEILLE 

N° 98-3186 
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Monsieur X... et autres 
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Monsieur LAFFET 
Rapporteur 
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Monsieur FEDOU 
Commissaire du gouvernement 
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Audience du 5 mars 2002 
Lecture du 19 mars 2002

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS 

 

Le Tribunal administratif de Marseille, 
3ème chambre, 

Plan de classement : 54-02-04

 

Vu, enregistrée le 20 avril 1998, la requête présentée pour :
- (page 1 : noms et adresse d'usagers des services publics d'eau et d'assainissement) ;
- l'Union Fédérale des Consommateurs, dont le siège est 36 bis, rue Paul Pamard à 84 000 AVIGNON ;
- l'Association pour l'Information des Usagers de l'Eau d'ENTRAIGUES-SUR-SORGUES dont le siège est à 84 320 ENTRAIGUES-SUR-SOGUES, intervenante volontaire,
agissant en exécution d'un jugement en date du 27 janvier 1998 du Tribunal d'Instance de Carpentras, par maître Henri BERGER, avocat ;

Les requérants demandent au Tribunal d'apprécier la légalité de deux délibérations en date du 30 mars 1993 par lesquelles le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux a autorisé la signature des traités d'affermage au profit de la société SDEI, intervenus les 30 mars et 20 avril 1993 et de déclarer que ces délibérations ainsi que les traités d'affermage qui ont été conclus sont nuls ;

Vu le jugement en date du 27 janvier 1998 du Tribunal d'Instance de Carpentras, les délibérations en date du 30 mars 1993 et les contrats d'affermage ;

Vu, enregistré le 17 août 1998, le mémoire en défense présenté pour le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux, dont le siège est 346 rue d'Allemand 84 201 CARPENTRAS Cedex, par maître PETIT, avocat ; le syndicat intercommunal conclut au rejet de la requête et à la condamnation de chacun des requérants à lui verser la somme de 500 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu, enregistré le 23 septembre 1998, le nouveau mémoire présenté pour le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux, par maître PETIT, avocat ; le syndicat intercommunal maintient ses conclusions de rejet ;

Vu, enregistré le 29 novembre 1998, le mémoire en défense présenté pour la société de distribution d'eau intercommunale (SDEI) dont le siège est 988, chemin Pierre Drevet 69 140 RILLIEUX LA PAPE, par maître Laurent RICHER, avocat ; la SDEI conclut au rejet de la requête ;

Vu, enregistré le 17 juillet 2000, le nouveau mémoire présenté pour la SDEI, par maître Laurent RICHER ; la SDEI maintient ses conclusions de rejet, par les mêmes motifs ;

Vu, enregistré le 21 février 2001, le nouveau mémoire présenté pour la SDEI, par maître Laurent RICHER ; la SDEI maintient ses conclusions de rejet ;

Vu, enregistré le 28 février 2002, le nouveau mémoire présenté pour les requérants par maître Henri BERGER, avocat ; les requérants demandent au Tribunal de surseoir à l'audiencement de la requête dans l'attente de l'aboutissement de la procédure pénale pendante devant la Cour d'Appel de Nîmes ;

Vu, enregistré le 28 février 2002, le nouveau mémoire présenté pour le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux, par maître PETIT, avocat ; le syndicat intercommunal maintient ses conclusions de rejet initiales par les mêmes motifs ;

Vu, enregistré le 28 février 2002, le nouveau mémoire présenté pour les requérants qui maintiennent leurs conclusions initiales, tant en ce qui concerne la demande de sursis à statuer qu'en ce qui concerne le fond et demandent que leur soit allouée une somme de 1 525 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 1er mars 2002, le nouveau mémoire présenté pour le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux ; le syndicat intercommunal maintient ses conclusions à fin de rejet et demande également au Tribunal de rejeter la demande de sursis à statuer formulée pour les requérants ;

Vu la lettre en date du 26 février 2002 par laquelle el président de la formation de jugement a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que le jugement paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code des communes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2002 :
- le rapport de Monsieur LAFFET, rapporteur ;
- les observations de Me BERGER pour Monsieur X... et autres, l'UFC et l'Association pour l'Information des Usagers de l'Eau d'Entraigues-sur-Sorgues ;
- les observations de Me DIDAY substituant Me PETIT  pour le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux ;
- et les conclusions de Monsieur FEDOU, commissaire du gouvernement ;

 

Considérant qu'après renvoi à statuer prononcé par le juge du Tribunal d'Instance de Carpentras le 27 janvier 1998 sur un litige opposant la société de distribution d'eau intercommunale (SDEI) à Monsieur X... et autres, et l'UFC d'Avignon, ces derniers ont saisi le Tribunal de céans de la question préjudicielle posée par le Tribunal d'Instance ;

 

Sur l'intervention de l'Association pour l'Information des Usagers de l'Eau d'Entraigues-sur-Sorgues :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : "L'intervention est formée par mémoire distinct" ; que, contrairement à ces prescriptions, l'intervention présentée devant le Tribunal Administratif par l'Association pour l'Information des Usagers de l'Eau d'Entraigues-sur-Sorgues, n'a pas été formée dans un mémoire distinct et n'est donc pas recevable ;

 

Sur la recevabilité :

Considérant, en premier lieu, que la requête en appréciation de validité formée par les requérants était revêtue du timbre fiscal de 100 francs, représentant le montant du droit de timbre prévu à l'article L. 411-1 du code de justice administrative ; qu'ainsi, la fin de non recevoir opposée pour ce motif doit être écartée ;

Considérant, en deuxième lieu, que lorsque le juge administratif est saisi sur renvoi de l'autorité judiciaire d'un recours en appréciation de validité d'un acte administratif, un tel recours est recevable à toute époque ; que la fin de non recevoir tirée de la tardivité doit également être écartée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer même que le président de l'Union Fédérale des Consommateurs n'ait pas été régulièrement autorisé à représenter l'association dans la présente instance, la requête est en tout état de cause recevable en tant qu'elle émane des autres requérants ;

Considérant, en quatrième lieu, que la question préjudicielle objet de la présente instance ne porte que, d'une part, sur la validité des deux délibérations en date du 30 mars 1993 par laquelle le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux a approuvé les contrats d'affermage "Eau" et "Assainissement" conclus avec la société de distribution d'eau intercommunale et a autorisé son président à signer ces contrats et, d'autre, part, sur la validité des contrats susmentionnés ; qu'ainsi, en se bornant à demander au Tribunal Administratif de déclarer nuls les deux délibérations du 30 mars 1993 et les deux contrats d'affermage qu'elles ont approuvé, les requérants n'ont pas outrepassé les limites posées par le jugement en date du 27 janvier 1998 du Tribunal d'Instance de Carpentras ; qu'en conséquence, les conclusions sus-analysées sont recevable ;

 

Sur le fond :

Considérant qu'il appartient au juge administratif saisi d'un recours en appréciation de validité d'une décision administrative de se prononcer sur la légalité de cet acte sans avoir à apprécier la régularité du jugement par lequel l'autorité judiciaire a invité les parties à poser la question préjudicielle ; qu'en outre, il n'est pas tenu de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision du juge pénal également saisi des faits reprochés à l'une des parties ;

 En ce qui concerne la légalité des traités d'affermage :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 163-11 du code des communes dans sa rédaction en vigueur à la date des délibérations en cause : "Les lois et règlements qui concernent le contrôle administratif et financier des communes sont applicables aux syndicats de communes" ; qu'aux termes de l'article 2-1 de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, alors applicable "Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès lors qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'État dans le département ou à son délégué dans le département..." ; qu'il est constant qu'à la date du 30 mars 1993 et à celle du 20 avril 1993 auxquelles le traité d'affermage de l'assainissement et celui de l'eau potable ont été respectivement conclus, les délibérations du syndicat en date du 30 mars 1993 autorisant le président à signer lesdits traités n'avaient pas été transmises à la préfecture de Vaucluse ; qu'il suit de là que lesdits contrats doivent être déclarés illégaux ;

En ce qui concerne la légalité des délibérations du 30 mars 1993 :

Considérant que la légalité des délibérations ne saurait être affectée par leur transmission tardive au représentant de l'État pour contrôle de légalité ; que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu de déclarer illégales les délibérations adoptées le 30 mars 1993 ;

 

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le Tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre parties des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux doivent, dès lors, être rejetées ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des requérants tendant à la condamnation du syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux et de la société de distribution d'eau intercommunale au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

 

 

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de l'Association pour l'Information des Usagers de l'Eau d'Entraigues-sur-Sorgues n'est pas admise.

Article 2 : Les traités d'affermage conclus respectivement le 30 mars 1993 et le 20 avril 1993 entre le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux et la société de distribution d'eau intercommunale pour l'exploitation du service d'assainissement et de distribution publique d'eau potable sont déclarés illégaux.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux et la société de distribution d'eau intercommunale au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Monsieur X... et autres, l'Union Fédérale des Consommateurs, l'Association pour l'Information des Usagers de l'Eau d'Entraigues-sur-Sorgues, le syndicat intercommunal des eaux de la région Rhône-Ventoux et la société de distribution d'eau intercommunale.

 

Délibéré à l'issue de l'audience du 5 mars 2002, où siégeaient :
Monsieur COUSIN, président
Monsieur LAFFET et Monsieur PAILLET conseillers, assistés de Mlle SOLA, greffier.

Prononcé en audience publique le 19 mars 2002.

 

La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoi à l'exécution du présent jugement.