M. Vallée, Rapporteur
M. Bachelier, Commissaire du gouvernement
Vu l'ordonnance en date du 21 mars 2001, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23 mars 2001, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Douai a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à cette cour par la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 22 février 2001, présentée par la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS, dont le siège est 26, rue des Martyrs à Lillers (62190) ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS demande :
1°) l'annulation du jugement du 21 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille, statuant sur la demande de Monsieur Patrick X..., agissant en exécution d'un jugement du tribunal d'instance de Béthune en date du 5 novembre 1998, a déclaré illégale la délibération du 27 mars 1996 du conseil de la communauté requérante instaurant une redevance d'assainissement, et l'a condamnée à verser à Monsieur Patrick X... la somme de 100 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
2°) la condamnation de Monsieur Patrick X... à lui verser la somme de 6 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 95-101 du 2 février 1995 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vallée, Auditeur,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un jugement en date du 5 novembre 1998, le tribunal d'instance de Béthune, saisi d'une demande de Monsieur Patrick X... tendant au remboursement par la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS de sommes perçues en 1996 et 1997 au titre de la redevance d'assainissement instituée par ladite communauté par une délibération de son conseil en date du 27 mars 1996, a sursis à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la légalité de ladite délibération ; qu'en application de cette décision, Monsieur Patrick X... a saisi le tribunal administratif de Lille qui, par un jugement en date du 21 décembre 2000, a déclaré illégale la délibération du 27 mars 1996 ; que la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS relève appel de ce jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales : "Les communes prennent obligatoirement en charge les dépenses relatives aux systèmes d'assainissement collectif, notamment aux stations d'épuration des eaux usées et à l'élimination des boues qu'elles produisent, et les dépenses de contrôle des systèmes d'assainissement non collectif. Elles peuvent prendre en charge les dépenses d'entretien des systèmes d'assainissement non collectif" ; qu'aux termes de l'article L. 2224-11 du même code : "Les services publics d'assainissement sont financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial" ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 2224-12 du même code : "Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles sont instituées, recouvrées et affectées les redevances dues par les usagers, ainsi que les sommes dues par les propriétaires mentionnés aux articles L. 33 et L. 35 du code de la santé publique" ;
Considérant que, par application de ces dispositions, le conseil de la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS a, par la délibération susmentionnée, institué une redevance d'assainissement dont l'assiette est la consommation d'eau potable ; qu'il ressort des termes mêmes de cette délibération que cette redevance, destinée à couvrir les dépenses du service public de l'assainissement collectif mis en place par la communauté de communes, s'applique à l'ensemble des habitants de son territoire, qu'ils soient ou non desservis par le réseau d'assainissement collectif ;
Considérant, d'une part, que le principe "pollueur-payeur", issu du I de l'article 1er de la loi du 2 février 1995 susvisée, et repris présentement à l'article L. 111-1 du code de l'environnement, n'a eu ni pour objet ni pour effet de modifier le régime applicable aux redevances d'assainissement ;
Considérant, d'autre part, que les habitants de communes dans lesquelles le réseau d'assainissement n'a pas encore été construit et mis en service ne peuvent être regardés comme des usagers du service public de l'assainissement collectif ; que, par suite, la délibération litigieuse du conseil de la communauté de communes ne pouvait légalement assujettir les habitants du ressort territorial de cette communauté, non desservis par le réseau d'assainissement collectif et n'ayant ainsi pas la qualité d'usager du service public d'assainissement collectif, au paiement de la redevance qu'elle a instituée ; que, dès lors, la délibération du 27 mars 1996 est, dans cette mesure, entachée d'illégalité sans qu'y fasse obstacle la circonstance, à la supposer établie, que le coût des installations d'assainissement collectif serait financièrement insupportable faute pour la communauté de communes de pouvoir soumettre au paiement de la redevance couvrant les dépenses relatives auxdites installations l'ensemble des habitants de son territoire, y compris ceux qui ne sont pas desservis par le réseau d'assainissement collectif ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif a déclaré illégale la délibération litigieuse en date du 27 mars 1996 en tant qu'elle a décidé l'assujettissement à la redevance qu'elle a instituée des habitants de son territoire non desservis par le réseau d'assainissement non collectif ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que Monsieur Patrick X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS à payer à Monsieur Patrick X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par Monsieur Patrick X...
sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont
rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la
COMMUNAUTE DE COMMUNES ARTOIS-LYS et à Monsieur Patrick X....
(...)