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CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES
DU NORD PAS-DE-CALAIS
ARRAS, le 27 MAI 1997
JP G/N V
N° 97-32 G
LE PRÉSIDENT DE LA
CHAMBRE RÉGIONALE
DES COMPTES DU
NORD-PAS-DE-CALAIS
à
Monsieur le Préfet de la Région
NORD-PAS-DE-CALAIS
Préfet du Département du NORD
2, rue Jacquemars GIELEE
59 039 LILLE CEDEX
AVIS n° 97-0079
V. Réf. : D.R.C.L.1-JFR/DM du 3 février 1997 et D.R.C.L.1/PK-AB du 4 mars 1997.
Objet : demande d'avis en date des 6 février et 6 mars 1997 sur l'avenant n° 6 au traité de concession conclu le 27 septembre 1985 entre la COMMUNAUTÉ URBAINE DE LILLE et la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD à LILLE pour la distribution de l'eau.
Par lettre du 3 février 1997, complétée par l'envoi de pièces complémentaires reçues par la juridiction le 6 mars 1997, vous avez transmis à la Chambre régionale des comptes, en application de l'article L. 1411-18 du Code général des collectivités territoriales, l'avenant n° 6 modifiant le traité de concession conclu entre la COMMUNAUTÉ URBAINE DE LILLE et la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD pour la distribution de l'eau. Conformément aux dispositions de cet article du code, la Chambre a procédé à l'examen de l'ensemble constitué par la convention et l'avenant. Cet examen a donné lieu à des réunions de travail avec la COMMUNAUTÉ URBAINE DE LILLE et la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD. Au vu du rapport établi à la suite de cet examen et des conclusions du commissaire du gouvernement, la Chambre a délibéré le 27 avril 1997 ; elle m'a chargé de vous transmettre les observations qui suivent et qui sont également adressées au Président de la Communauté Urbaine.
I- LA RELATION CONTRACTUELLE
A- Le contrat initial
La Chambre constate que la situation de la distribution de l'eau sur l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine n'a pu être uniformisée lors de la création de cette dernière et qu'elle demeure caractérisée par un manque d'unité, même si elle relève actuellement, pour l'essentiel, des relations contractuelles examinées.
En 1985, l'établissement public a décidé de reprendre à son compte la gestion de l'assainissement, en anticipant de cinq ans le terme du contrat qui le liait à la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD, sous le régime de l'affermage. C'est sous le même régime contractuel que la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD assurait, alors, sur une partie du territoire communautaire, la distribution de l'eau, qui était toutefois effectuée par une régie communautaire dans la zone LILLE ROUBAIX TOURCOING.
La convention n'étant pas arrivée à son terme, cette reprise de l'assainissement a fait l'objet d'une négociation qui a comporté pour la Communauté urbaine, des contreparties : ainsi la distribution confiée à la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD a été reconduite et étendue au territoire auparavant géré par la régie communautaire, dans le cadre d'une concession d'une durée de 30 ans.
La Chambre estime en premier lieu qu'il n'existait alors aucune raison juridique ou financière obligeant à modifier le régime contractuel en vigueur jusque là ; l'extension territoriale de la mission confiée pour la distribution de l'eau pouvait, en effet, être réalisée dans le cadre de l'affermage et il n'était donc pas nécessaire de s'engager pour une aussi longue durée.
Mais surtout, elle constate au vu de l'ensemble des documents établis en 1985, qu'il s'agisse du traité de concession ou des pièces relatives à la réorganisation des services de l'eau, que ni le dispositif adopté ni son application n'ont été satisfaisants.
Sur le premier point, le tarif perçu auprès des usagers, comportant une partie fixe et une partie proportionnelle, ne peut résulter que d'une évaluation des obligations incombant au concessionnaire sur la durée totale du contrat et de sa rémunération. Le résultat de cette démarche doit s'inscrire, naturellement, dans le contrat sous forme d'un bilan et d'un compte de résultat prévisionnels, intégrant notamment les paramètres fondamentaux que sont les investissements nouveaux et les travaux de renouvellement des installations, ces derniers devant être évalués et situés sur la durée de la concession. Or, la Chambre relève que le traité de concession ne comprend aucune donnée relative à la structure des prix et que la délibération du 27 septembre 1985 indique seulement que le prix de base de l'eau correspond au prix appliqué au 1er janvier par la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD.
En ce qui concerne l'application de la convention, elle note également que l'établissement public a mis à disposition du concessionnaire ses installations sans qu'il soit procédé à un inventaire contradictoire, contrairement aux dispositions expresses de l'article 5 du traité de concession.
La Chambre note enfin que le traité prévoyait à la fois une information annuelle, certes insuffisante, et un droit de contrôle au profit de l'établissement public, qui n'a pas été défini ni pratiqué.
La Chambre est conduite ainsi à estimer que la Communauté urbaine s'est engagée pour une longue période sur un tarif de base de l'eau qui ne résultait pas d'une évaluation économique générale des composantes de la convention. La Chambre observe que les avenants conclus de 1990 à 1994 n'ont pas modifié cette situation.
B- L'avenant n° 6
Au terme d'une procédure de recours à une commission arbitrale, les parties ont convenu d'une révision des tarifs de base, des travaux neufs et d'une évaluation périodique des conditions économiques du contrat.
La commission arbitrale a confirmé la nécessité de procéder à des révisions périodiques. L'avenant n° 6 procède à une première révision, qui s'inscrit dans les recommandations de la commission, et convient d'une révision en 2001.
Cette première révision se traduit par une baisse du tarif de base de l'eau, dans sa partie proportionnelle et en termes de facturation, de 42,6 centimes par mètre-cube. Cette réduction résulte d'un partage des gains de productivité à compter de l'exercice 1996, et d'une "prudente" réduction des provisions pour renouvellement à compter du même exercice, d'une affectation partielle de produits financiers réalisés sur les provisions constituées pour le renouvellement et non utilisées.
La nouvelle phase contractuelle
L'avenant n° 6 s'inscrit dans un nouvel étal d'esprit, plus conforme à la portée de la notion de délégation de service public, et susceptible de corriger, en partie, les défauts initiaux du contrat.
En effet, une délégation de service public doit d'une part se fonder sur une réalité économique cernée, et d'autre part en raison même de sa durée, prévoir une évaluation continue de son exécution et les révisions nécessaires. Si une délégation comporte une responsabilisation du concessionnaire qui s'engage "à ses risques et périls", il ne saurait en résulter une dÈresponsabilisation, éventuellement subie, de la part de la collectivité délégante qui représente l'ensemble des abonnés et doit s'assurer à ce titre que la tarification corresponde à une réalité économique.
La loi n° 95-127 a introduit l'obligation pour le délégataire de service public de fournir un compte rendu annuel comprenant, "notamment", un compte retraçant "toutes les opérations de la délégation sur l'année". Cette obligation de transparence rejoint cette préoccupation de clarté de la réalité économique du contrat. Et, si les parties ont convenu de procéder périodiquement à une révision, il paraît tout aussi important d'adosser ces révisions à une information annuelle suffisante.
Sur ce point, la préoccupation manifestée par la Communauté urbaine, la révision à laquelle elle a voulu procéder en 1996, l'intervention de la Commission arbitrale et les nouveaux éléments contractuels constituent donc des éléments positifs, mais des améliorations complémentaires restent à apporter.
II- LES AMÉLIORATIONS COMPLÉMENTAIRES À APPORTER
Ces améliorations portent sur l'information et sur certains aménagements contractuels.
A- L'information donnée par le cocontractant.
Une information financière plus globale s'est substituée, à compter des opérations de l'exercice 1994, à la fourniture d'indicateurs financiers isolés impropres à une mesure économique de la délégation. Cette information demeure néanmoins peu satisfaisante.
1- L'information annuelle fournie pour les exercices 1994 et 1995
Sur cette information la Chambre formule des observations sur trois points :
a) Au vu des renseignements annuels portant sur les exercices 1994 et 1995, la Chambre estime que certains éléments de charge et produit n'ont pas à figurer au compte de résultat de la délégation. En effet, les surtaxes et redevances perçues par le délégataire pour le compte des tiers ne font l'objet que d'un reversement à leurs bénéficiaires. Cette charge contractuelle est assurée contre la perception d'une rémunération à caractère réglementaire. Hormis cette prestation et sa contrepartie, les redevances concernées, qui représentent 60 % des charges du compte remis pour 1995, sont neutres pour l'économie de la distribution de l'eau et ne doivent donc être retracées qu'en annexe au compte de résultat.
b) Si le compte de résultat ne doit pas être déformé par la prise en compte d'éléments étrangers, il convient que les éléments constitutifs du résultat soient suffisamment explicites.
Or, la Chambre observe qu'il a été procédé à des agrégations de charges qui ne permettent pas de rendre compte des opérations. Ainsi, en 1995, un montant de 430860 M.F., soit 12 % des charges réelles de l'exercice, est porté sous le terme générique "autres dépenses". La remarque peut être généralisée en charges, puisque ne sont individualisées que les charges d'énergie, pour un montant de 1,65 M.F., et d'analyses, pour un montant de 1,43 M.F.. Les produits accessoires, s'ils ne constituent pas un montant important, témoignent d'une élasticité importante entre 1994 et 1995. La Chambre estime que les agrégations ne peuvent répondre à la finalité du compte de résultat annuel et ne permettent pas de rendre compte des conditions d'exécution de la délégation de service public.
c) L'origine et le contenu des données constituant le résultat dépendent étroitement des procédures et méthodes de comptabilisation appliquées dans la société délégataire.
Le Plan Comptable Général de 1982 oblige l'entreprise concessionnaire à distinguer l'activité de chacune de ses concessions ou de chaque catégorie de concession dans des comptes de résultat appropriés.
Au cas présent, la société qui gère, outre son activité propre de production d'eau, 17 contrats de distribution et 9 contrats d'assainissement, ne distingue pas ses différentes activités et contrats dans sa comptabilité générale, ce qui ne permet pas de différencier directement les résultats. Les comptes de résultat sont dégagés pour l'essentiel d'un traitement de données comptables : évaluation économique de certaines données, répartition et imputation des charges et produits par type d'activité, puis par contrat.
La société remet certes dans le compte rendu annuel, une note méthodologique relative à la procédure d'établissement du compte annuel de la délégation, mais la Chambre constate que l'information et les données ne sont pas suffisamment précises et ne permettent, donc, pas un contrôle satisfaisant.
En premier lieu, le compte de résultat annuel ne peut être constitué de seuls coûts comptables : des éléments du coût des prestations doivent être ajustés ou majorés pour donner des coûts économiques complets. Or, si la démarche retenue pour l'évaluation économique de données comptables est différenciée selon qu'elle concerne l'utilisation du patrimoine du concessionnaire pour l'exécution de la mission confiée, l'utilisation des fonds propres de la société pour réaliser des investissements neufs qui reviendront à l'établissement public en fin de contrat, la Chambre relève que les résultats de cette démarche ne sont pas correctement retranscrits au niveau du compte de résultat. Le détail d'information n'est pas suffisant : si les charges relatives aux investissements neufs contractuels et les charges relatives aux compteurs font l'objet d'une valorisation et d'une mention spécifiques, il n'en va pas de même des loyers et autres redevances d'utilisation imputées par le délégataire à la délégation pour l'utilisation de son domaine privé, ceux-ci sont en effet compris dans le montant de la rubrique "Autres dépenses", soit 43,8 M.F., valeur qu'ils composent à hauteur de 60 %. La Chambre note, en outre, que le compte rendu annuel ne retrace pas, en annexe, l'évaluation de ces différents éléments.
En second lieu, l'affectation des charges qui ne peuvent faire l'objet d'une imputation directe à une activité est assurée selon unité d'oeuvre "valeur ajoutée". Ainsi en 1995, 71,6 M.F. de frais généraux non directement imputables sur un total de 83,2 M.F. ont été affectés à l'activité de distribution d'eau. Ce chiffre résulte en quasi totalité de l'application de valeurs différentes de l'unité d'oeuvre "valeur ajoutée", calculées pour des ensembles d'activités et appliquées aux charges par nature. Au niveau de l'élaboration des comptes de résultat de chacun des contrats de distribution de l'eau, la société procède également au calcul d'une unité d'oeuvre "valeur ajoutée" pour l'imputation des frais généraux de l'activité, les autres charges, d'entretien et de gestion clientèle étant répartis entre les contrats selon des indicateurs physiques représentatifs (mètres linéaires de canalisation, nombre d'abonnés...). En outre, la Chambre relève que l'unité d'oeuvre "valeur ajoutée", objet dans la note de procédure d'une définition, d'ailleurs simplificatrice de la pratique effective, ne fait pas l'objet d'une valorisation dans le compte rendu annuel, alors qu'elle constitue un élément majeur de la procédure d'établissement du compte de résultat.
Le montant total des frais généraux et redevances d'utilisation -hors compteurs- imputés à l'activité distribution, qui regroupe d'ailleurs la distribution proprement dite et les travaux branchements, représente en 1995 une valeur de 101,2 M.F., soit 75 % des frais répartis. Le montant de "frais généraux" imputé au contrat de délégation examiné s'élève en 1995 à 96 M.F., soit 93 % de l'ensemble des frais généraux répartis et 37 % de l'ensemble des charges imputées au contrat. L'importance de ces postes de charges et leur répercussion sur le prix de l'eau démontrent la nécessité d'une information claire sur les modalités de leur calcul et de leur affectation.
La Chambre estime donc que la note de méthodologie -qui constitue une synthèse des principes de traitement des données-, comme les valeurs portées au compte annuel ne suffisent pas pour informer valablement le concédant sur la réalité économique de la délégation et la situation des tarifs de base.
2- L'information et les justifications complémentaires à assurer dans le cadre du contrat
Si l'économie d'un contrat de longue durée, en l'espèce 30 ans, ne peut s'apprécier que globalement, le compte rendu annuel doit permettre d'apprécier son évolution au cours des différentes années. Le compte rendu financier doit donc comporter toutes les données concernant l'exploitation et le patrimoine, reliées avec une lisibilité suffisante aux données de la comptabilité générale.
Ceci suppose également que les conditions financières d'exécution de la délégation soient clairement exposées. Tel n'est pas le cas actuellement, en sorte que la Chambre est conduite à inviter les parties à aménager contractuellement le contenu financier du compte rendu annuel, dont le principe a été posé par la loi.
a) Les charges courantes d'exploitation
Compte tenu des imperfections qui viennent d'être rappelées, la Chambre estime que le compte de résultat, et ses annexes, doivent rendre compte des méthodes et procédures retenues par la société. Compte tenu de l'absence de différenciation comptable, elle estime que le compte rendu annuel de la délégation doit être situé dans l'ensemble des activités de la société, et dans l'activité dont il relève. Ceci suppose une homogénéité de présentation. Le compte de résultat de la délégation doit présenter des intitulés de charge suffisamment clairs et ne pas regrouper excessivement les charges, pour rendre compte clairement de leur nature. Il doit également rendre compte du mode d'affectation des charges en distinguant les valeurs selon qu'elles relèvent de la comptabilité générale, de la comptabilité analytique. Les informations complémentaires doivent retracer la procédure appliquée en comptabilité analytique, l'élaboration et la valorisation des unités d'oeuvre. Cette démarche correspond, moyennant un aménagement et une information complémentaire, aux états que la société établit annuellement, actuellement pour un seul usage interne.
Mais, s'agissant des charges d'exploitation, la Chambre est également conduite à formuler trois remarques supplémentaires, qui lui semblent appeler une clarification.
Elle relève tout d'abord que les contrats supportent des charges imputées à un compte "domiciliation", dont la valeur prise en charge dans la comptabilité 1995 est de 10 M.F.. Ces sommes correspondent à des facturations des deux principaux actionnaires de la société. Celles-ci sont établies en application d'une délibération du Conseil d'administration, en date du 13 octobre 1988, qui en avait fixé le principe et les modalités. La rémunération ainsi convenue consistait en une redevance pour des prestations de gestion et dépenses de recherche, à arrêter annuellement, et une redevance commerciale fixée à 0,35 % du chiffre d'affaires de la SEN, dont la finalité concernait notamment l'obtention, le maintien et le renouvellement des contrats. Or, dans la pratique, les modalités initiales ont évolué vers une forfaitisation des rémunérations, dont la justification n'apparaît pas malgré certains éclaircissements donnés. En outre, les factures examinées dans la comptabilité 1995 concernent l'année 1994 et portent en objet la mention "Rémunération des moyens et compétences mis à disposition" ; or, la Chambre a constaté, à partir du compte "honoraires administratifs", que la société recoure à des cabinets extérieurs et a réglé en 1995 une facture d'une société relevant de l'un des actionnaires, pour un montant de 300 KF, à titre de participation au financement d'un programme. L'examen de cette facture conduit à constater que plusieurs "filiales" contribuent à ce programme et que la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD, en plus du versement mentionné, a fourni une contribution en nature de 400 KF, ce qui porte sa participation à 700 KF hors taxes.
Les relations entretenues avec d'autres sociétés méritent également d'être décrites et quantifiées. Ainsi la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD entretient des liens de coopération avec la SOCIÉTÉ DES EAUX DE DOUAI, à laquelle elle apporte un concours logistique, en application de délibérations de son Conseil d'administration en date des 11 décembre 1986 et 11 octobre 1990. Ces relations devraient être retracées et la compensation financière clairement exposée. De même, la Chambre relève que le recours à des sous-traitants en matière de travaux et pour l'entretien du réseau, a été payé sur la base d'une série de prix, dont l'origine n'est pas précisée, avec application d'un coefficient de 1,29. Elle estime que les conditions générales de sous-traitance, objet sans doute d'un cahier des charges conventionnel, devraient faire l'objet d'une information annexe au compte de résultat qui ferait état des relations établies avec d'autres sociétés, en en spécifiant les conditions. Il en va de même, enfin, pour les conditions générales de recours au travail intérimaire.
Il convient également que ce compte rendu mentionne les conditions internes d'exploitation (situation conventionnelle des rémunérations et le régime de retraite par exemple).
b) Les charges résultant d'une évaluation économique
L'utilisation du patrimoine de la SOCIÉTÉ DES EAUX DU NORD fait l'objet d'une imputation au compte du délégataire sous forme soit de loyers pour les terrains et constructions, soit de redevances d'utilisation pour les autres investissements.
Les loyers sont calculés en appliquant un taux de 7 % à une valeur locative annuelle. Celle-ci est elle-même déterminée sur la base de la valeur d'intégration des biens indexée au moyen de l'indice INSEE de la construction. Les charges supportées par la société pour les immeubles concernés sont affectées aux activités, puis au contrat. La Chambre constate que le taux retenu de 7 % n'a pas de justification économique. Elle estime que ce taux et la rémunération, qui en résulte, devraient faire l'objet d'un commentaire complémentaire en annexe.
Les redevances d'utilisation relatives aux installations techniques, aux matériels et mobiliers, sont évaluées avec la double préoccupation de rémunérer le capital utilisé à leur acquisition et d'acquérir une somme suffisante pour pourvoir au remplacement de chaque bien au terme de la durée de vie.
Ces redevances correspondent à la valeur de l'annuité d'amortissement comptable, à l'indexation des biens au moyen de l'indice INSEE de la consommation, et à un loyer financier résultant de l'application à la valeur nette des biens concernés du taux de base bancaire majoré de 1,55 point.
La Chambre estime que, pour le coût de financement, la pertinence de la référence au taux de base bancaire majoré de 1,55 point, soit le taux standard utilisé par les établissements bancaires pour le calcul des intérêts débiteurs, n'est pas assurée. De même, l'indexation sur l'inflation, en retenant pour l'ensemble des biens concernés l'indice mensuel des prix à la consommation de l'ensemble des ménages France entière, n'a sans doute pas été à même de cerner la réalité économique dans la première période du contrat. Cette indexation uniforme n'a sans doute pas plus de justification actuellement, même si l'indice connaît une évolution modérée.
Elle considère que ces charges, soumises pour partie au mécanisme de répartition des frais généraux, doit faire l'objet de lignes distinctes, par nature, au compte de résultat, comme pour les investissements contractuels et les compteurs. Elle estime également qu'il convient de retracer en annexe au compte de résultat les différents éléments constitutifs de la valeur portée au compte, et la consistance comme l'affectation des biens concernés.
S'agissant des compteurs, la redevance d'utilisation portée au compte 1995 de la délégation pour une valeur de 8,27 M.F. appelle, sur ce point, une observation complémentaire. L'annexe à l'article 20 du règlement de distribution de la délégation précise que l'abonnement, ou partie fixe, est une "somme destinée à couvrir les charges fixes du Service, notamment l'entretien du branchement, la location et l'entretien du compteur ainsi que le maintien en service de la distribution". La Chambre estime que la location d'un bien comprend également son renouvellement. Elle considère donc que la mesure d'une charge économique relative aux amortissements compteurs ne lui semble pas avoir de justification et qu'elle conduit à une déformation du résultat annuel de la délégation.
Pour l'utilisation des fonds propres de la société dans le cadre des travaux neufs, la redevance est égale à l'annuité constante d'un emprunt à taux fixe annuel, soit 6,30 % en 1995, sur la durée allant de la date d'investissement à la date de fin du traité. L'annuité est revalorisée chaque année selon la variation constatée de l'index général de travaux publics sur le mois de décembre. La Chambre estime que les références utilisées devraient être motivées économiquement.
c) Le tarif de base et le compte de résultat
La Chambre considère que si le tarif de l'eau recouvre une réalité économique qui n'a pas été cernée initialement, rien ne s'oppose à ce qu'un contenu lui soit désormais donné.
Le tarif de base contractuel et la facturation de l'eau sont de type binôme, conformément aux dispositions en vigueur. L'article 13-II de la loi 92-3 du 3 janvier 1992 prévoit en effet que toute facture d'eau comprendra un montant calculé en fonction du volume réellement consommé par l'abonné à un service de distribution de l'eau et pourra, en outre, comprendre un montant calculé indépendamment du volume, compte tenu des charges fixes du service et des caractéristiques du branchement.
Dans la mesure où la facturation comprend au cas d'espèces une partie fixe, la Chambre estime que la structure du prix de base doit être retracée au compte rendu annuel, en termes quantitatifs et qualitatifs pour ses deux composantes, qu'elle doit constituer une information figurant en annexe, sans présider à la structure du compte de résultat.
Le compte de résultat présenté sous la forme d'un compte d'exploitation différentiel, devrait répondre aux exigences suivantes :
- être situé dans les activités de la société et au sein de l'activité dont relève le contrat, ce qui suppose la production, en respectant une homogénéité de présentation, du compte d'exploitation différentiel établi pour les différentes activités ;
- opérer, pour le compte de résultat par activités, le recoupement avec les données comptables, en mettant en évidence les différences d'incorporation ;
- ne comporter que les charges incorporables, sans retracer les consommations n'ayant pas contribué à l'objet du contrat, les éléments à caractère exceptionnel étant retracés en annexe ;
- distinguer les consommations extérieures, les frais sur activité, les charges supplétives et d'usage et les classer par nature en recourant, le cas échéant, à la nomenclature comptable ;
En annexe au compte de résultat, le compte rendu devrait fournir, outre un détail des produits divers, tous les éléments d'information permettant de situer les données, à savoir :
- les conditions générales de l'exploitation : relations avec sociétés tierces, spÈcificitÈs internes ;
- les valeurs et modalités d'élaboration des unités d'oeuvre retenues pour l'affectation indirecte des charges ;
- la désignation des biens considérés dans les loyers et redevances d'utilisation, dans leur consistance et leur affectation, ainsi que le détail d'évaluation de la charge annuelle et la motivation économique des différents taux et références employés ;
- le contenu des écarts constatés entre les valeurs portées au compte de résultat par activités et les valeurs correspondantes de la comptabilité générale ("différences d'incorporation").
B- Les aménagements contractuels complémentaires à apporter
1- Le renouvellement des installations
Une des missions incombant au délégataire consiste à remettre en fin de délégation à l'établissement public "tous les ouvrages -biens meubles et immeubles- et le matériel de la distribution en état normal de service". A cette fin, la délégation lui a donné la mission d'en financer et réaliser le renouvellement avec pour seules obligations le respect d'un seuil minimal annuel et la soumission à l'autorité délégataire du programme annuel pour avis.
Il est regrettable que la politique du renouvellement n'ait fait l'objet ni d'une évaluation financière ni d'une programmation dans la phase de négociation du traité, en sorte que le délégataire a disposé d'un pouvoir excessif pour la détermination de la politique et les modalités de sa mise en oeuvre. Toutefois, il n'en demeure pas moins que le renouvellement constitue un élément majeur de la délégation et qu'à ce titre, l'information de l'établissement public doit être complète et les intérêts de la collectivité protégés.
Le compte de résultat annuel comporte une charge représentative d'une contribution à la constitution d'une provision permettant au délégataire de faire face à cette mission. Le délégataire porte au compte rendu annuel une valeur au titre de la garantie de renouvellement. Cette valeur résulte d'un lissage sur la durée du contrat de la valeur estimée par le délégataire pour une remise des installations en état normal de service au terme du contrat. Elle est actualisée chaque année.
Elle doit être distinguée de la valeur comptable de la pr