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Chambre Régionale des Comptes Ile-de-France
Lettre d'observations définitives du 10/12/1999 sur la gestion du Syndicat
intercommunal - Syndicat des eaux de la Presqu'Ile de Gennevilliers - Nanterre
(Hauts-de-Seine) - Exercices 1991 à 1995
La Chambre régionale des comptes d'Ile-de-France a procédé à la vérification des comptes des exercices 1991 à 1995 et à l'examen de la gestion du syndicat des eaux de la Presqu'Ile de GENNEVILLIERS. A cette occasion, elle a notamment examiné les relations entre le syndicat et le délégataire du service de distribution de l'eau, divers marchés de travaux et divers postes de dépenses de fonctionnement. Les vérifications effectuées ont été actualisées, en tant que de besoin, sur les exercices ultérieurs.
L'entretien préalable prévu à l'article L.241-7 du code des juridictions financières s'est déroulé le 21 octobre 1997 avec le président du syndicat.
La Chambre, lors de sa séance du 25 février 1998, a formulé des observations provisoires qui ont été adressées au président du syndicat et à son prédécesseur le 22 décembre 1998.
Des extraits des observations la concernant ont été adressés, à la même date, à la société Eau et Force.
Les réponses du président du syndicat et de son prédécesseur sont parvenues à la Chambre le 22 février 1999, la société Eau et Force a répondu le 22 janvier 1999.
Lors de sa séance du 24 juin 1999, la Chambre a arrêté les observations définitives suivantes :
1. - LES RELATIONS AVEC L'EXPLOITANT DU SERVICE DE DISTRIBUTION D'EAU
Un contrat d'affermage concernant l'exploitation du réseau de distribution d'eau a été conclu le 22 avril 1991 entre la CEB (Compagnie des Eaux de la Banlieue parisienne, devenue par la suite Eau et Force) et le syndicat des eaux de la Presqu'Ile de GENNEVILLIERS pour une durée de 20 ans. Son contenu et son application appellent deux observations.
1.1. - LA REDEVANCE DOMANIALE
L'article 30 de la convention prévoit que : « La CEB verse au syndicat une redevance pour occupation du domaine public et pour utilisation des installations qui lui sont confiées dans les conditions suivantes :
la valeur totale de la redevance est fixée à 0,66 F/m3 vendu. Elle sera indexée dans les mêmes conditions que le prix de l'eau par application de la formule définie à l'article 33.
(…)
Le tarif est constitué d'une partie fixe, fonction du diamètre du compteur, et d'une partie proportionnelle fonction de la consommation constatée ou évaluée ».
Par ailleurs, une délibération du comité syndical du 12 février 1992 a réglé les modalités de la répartition de ladite redevance domaniale. Elle prévoit que « le produit net de la redevance pour occupation du domaine public communal et pour utilisation des installations versé au syndicat sera reversé aux neuf communes (…) » ; que « le produit net est égal à la valeur de la redevance perçue par le syndicat diminuée des frais syndicaux » ; et enfin que « (…) la répartition du produit net entre les communes sera basée pour moitié au prorata des consommations d'eau constatées dans chaque commune et pour moitié en fonction de la population basée sur le dernier recensement ».
En application de ces dispositions, le syndicat a reversé aux communes membres, en 1996, une somme de 26,9 millions de francs. Un tel reversement n'est pas prévu par la convention d'affermage. S'il l'était, cette clause serait d'une régularité douteuse au regard des dispositions de l'article 40, alinéa 4 de la loi n° 93-122 modifiée du 29 janvier 1993, dite Loi Sapin, selon lequel « les conventions de délégation de service public ne peuvent contenir de clauses par lesquelles le délégataire prend à sa charge l'exécution de services ou de paiements étrangers à l'objet de la délégation ». Dans une affaire concernant la ville de SAINT-ETIENNE (30 septembre 1996), le Conseil d'Etat a jugé illégale une délibération approuvant un contrat de concession du service des eaux, contrat dans lequel la tarification répercutait sur les usagers le versement par le concessionnaire de sommes sans rapport avec la valeur des prestations fournies par le concédant.
Le président du syndicat a indiqué que les reversements aux communes étaient, selon lui, la contrepartie d'investissements, réalisés par celles-ci pour l'établissement des canalisations de distribution communale. Il a néanmoins reconnu que cette pratique peut être mise en question, compte tenu des dispositions de la loi Sapin. La Chambre prend note de l'intention exprimée par le syndicat de réviser sur ce point le contrat d'affermage.
1.2. - LES BATIMENTS ADMINISTRATIFS MIS A DISPOSITION DU FERMIER
La société Eau et Force a installé la direction et les services généraux de son Centre régional dans des locaux appartenant au syndicat sans que celui-ci perçoive à ce titre un loyer distinct des redevances qu'il perçoit par ailleurs. Il est nécessaire de clarifier sur ce point les relations avec le délégataire. Cela pourrait se faire en prévoyant le versement direct d'un loyer par le fermier pour l'ensemble des bâtiments administratifs, assorti d'une clause limitant la répercussion de ce loyer sur les usagers du syndicat, au prorata de la part de l'activité des services installés dans ces bâtiments concernant ces mêmes usagers.
La Chambre a pris note sur ce point de la réponse du président du syndicat, annonçant la mise en place d'un loyer spécifique à l'occasion de la négociation d'un avenant au contrat .
2. - LES MARCHES DE TRAVAUX
2.1. - LA COMMISSION D'APPEL D'OFFRES
Dans sa rédaction issue du décret n° 92-1230 du 15 décembre 1992, l'article 279-1 du code des marchés publics fixe expressément la composition de la commission d'appel d'offres. Pour un syndicat intercommunal tel que le syndicat des eaux de la Presqu'Ile de GENNEVILLIERS, comprenant des communes de plus de 3.500 habitants, cette commission se compose du président et de cinq membres désignés par le comité syndical.
A l'occasion de son contrôle, la Chambre a constaté que le syndicat n'avait pas institué une telle commission : ses fonctions étaient remplies par une commission dite de travaux, composée de 9 élus représentant chacune des collectivités membres.
Cette irrégularité est une cause de nullité des décisions de cette instance. La Chambre a pris note de la régularisation intervenue sur ce point le 11 février 1998, date à laquelle une commission d'appel d'offres a été constituée conformément aux textes.
2.2. - LES TRAVAUX D'AGRANDISSEMENT DE L'USINE DE TRAITEMENT DE L'EAU
Des travaux d'agrandissement de l'usine de traitement de l'eau ont été décidés par le syndicat en 1991. L'opération, dont le coût total était évalué à 108.000.000 F, se termina en 1994.
Pour la fourniture des équipements de traitement (46,256 millions de francs), le syndicat passa en 1991 un marché négocié sans mise en concurrence. Des arguments tendant à justifier cette absence de concurrence ont été présentés lors de la réunion de la commission des travaux du 26 septembre 1991 : complexité de l'opération en raison des contraintes liées au maintien de la production pendant les travaux ; exigence de disposer d'une installation nouvelle cohérente et compatible avec les installations existantes ; nécessité de recourir à des appareils brevetés.
Ces arguments, repris dans la réponse du syndicat aux observations provisoires de la Chambre, n'apparaissent pas entièrement convaincants. Sans méconnaître les contraintes techniques liées à la coexistence d'installations existantes et nouvelles, il n'est pas démontré qu'aucun autre fournisseur n'ait pu s'adapter à ces contraintes. Seul, un appel à la concurrence aurait pu permettre de lever cette incertitude.