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Lettre d'observations définitives du 18 décembre 1997 sur la gestion du service d'assainissement de l'agglomération grenobloise (AQUAPOLE) - Chambre régionale des comptes Rhône-Alpes

  1. Le contexte
    1. Historique et structure actuelle du réseau
    2. Les inconvénients du système
  2. La construction d'AQUAPOLE et les problèmes techniques de la station
    1. Une construction rapide mais coûteuse
    2. Un ouvrage aux performances imparfaites
      1. La dilution anormale de l'effluent
      2. Le problème non résolu des eaux parasites
      3. Conséquences
  3. La "concession contrôlée"
    1. La mise au point du projet
      1. Les objectifs initiaux
      2. Le passage à la formule de la "concession contrôlée"
      3. L'impact financier
    2. La convention
      1. Durée et coût des travaux
      2. Rémunération du concessionnaire
    3. Les avenants
    4. L'évolution de la dépense subventionnable
      1. 1ère phase "physico-chimique"
      2. 2ème phase "biologique"
      3. Bilan
    5. Les coûts spécifiques des travaux
  4. Analyse des comptes rendus financiers
    1. Les dépenses de maintenance et d'exploitation
    2. Frais financiers/besoin en fonds de roulement
    3. Provisions pour renouvellement du matériel
    4. Provisions pour impayés
    5. Charges de structure
  5. Le rôle du cabinet MERLIN
    1. Les interventions
    2. Les honoraires de maîtrise d'oeuvre
    3. Le contrôle de la concession
  6. Développements récents
    1. Mise au point d'une nouvelle convention
    2. Révision du schéma d'assainissement
  7. Conclusion

 

1. Le contexte

1.1. Historique et structure actuelle du réseau

L'organisation actuelle de l'assainissement dans l'agglomération grenobloise s'explique essentiellement par l'histoire du réseau collecteur. Constitué progressivement depuis le XIXème siècle, celui-ci s'est longtemps mis en place sans vision d'ensemble. Contrairement à ce qui s'est passé pour l'eau potable, qui représenta un enjeu politique et technique pour Grenoble, l'assainissement ne constituait pas une priorité, comme en témoigne sa faible part dans les budgets municipaux.

Avant la construction d'Aquapole, le schéma départemental d'assainissement mis au point par la DDE et la DDA en 1973 constituait la référence en la matière. Ce schéma prévoyait cinq stations d'épurations, correspondant aux bassins versants des vallées qui convergent à Grenoble, implantées au Fontanil, à La Tronche, Sassenage, Echirolles et Murianette. De ce programme, seule la station du Fontanil (35.000 équivalents-habitants ou EH, la notion d'équivalents-habitants n'est pas la seule possible pour calibrer les stations, mais elle est couramment utilisée), a été réalisée et mise en service en 1977. Par ailleurs, a été construite de façon indépendante la station de Montbonnot, mise en service en 1985 (10.000 EH).

Pour répondre aux besoins de l'agglomération, il a finalement été décidé de construire une station de grand capacité, Aquapole (430.000 EH), d'abord prévue à Sassenage, puis implantée au Fontanil, à côté de la station existante. Envisagée pour 1991, la construction d'Aquapole a été anticipée, principalement pour tenir compte de la décision d'EDF de réaliser trois barrages dans le cadre de l'aménagement dit "Isère moyenne aval".

La structure actuelle du système de l'assainissement est relativement complexe. De nombreuses collectivités, syndicats ou communes isolées coexistent, quasiment tous raccordés à Aquapole, mais en conservant leur autonomie de décision et de gestion, chaque collectivité étant responsable de ses réseaux. Outre les trois stations d'épuration, le système central comprend un réseau de grands collecteurs, constitué depuis le milieu des années 70, d'une longueur de 32 km environ, 32 stations de pompage et de relèvement et des déversoirs d'orage, dont les principaux sont situés aux jonctions importantes autour de Grenoble : La Mogne, Jean Macé, la Grande Saône et Fontenay.

Les effluents raccordés à Aquapole transitent ainsi par trois grandes catégories de réseaux :

Ces réseaux sont gérés par différents syndicats parmi lesquels le SIRD (Syndicat Intercommunal de la Rive gauche du Drac), anciennement SIAS (Syndicat Intercommunal d'Assainissement du canton de Sassenage), le SIADI (Syndicat Intercommunal d'Assainissement du Drac Inférieur), le SIEC (Syndicat Intercommunal de l'Egout Collecteur), le SIBHA (Syndicat Intercommunal de Brié Herbeys pour l'Assainissement).

Le gestionnaire le plus important est cependant la CCAG (Communauté de Communes de l'Agglomération Grenobloise) qui s'est substituée au SIEPARG (Syndicat d'Etudes et de Programmation pour l'Aménagement de la Région Grenobloise) pour sa vocation assainissement le 24 décembre 1993, et comprend 23 communes dont Grenoble. La CCAG n'est maître d'ouvrage et responsable de l'exploitation que des parties structurantes du système d'assainissement, les communes membres assurant la maîtrise d'ouvrage et l'exploitation de leurs réseaux propres de façon indépendante. La CCAG est le principal opérateur sur le plan technique (c'est le plus important groupement de communes, il est à l'aval du système, c'est le maître d'ouvrage d'Aquapole) et le principal attributaire des aides de l'Agence de l'Eau (240 millions de francs en une vingtaine d'années).

Enfin, un syndicat indépendant (sauf pour la commune de Bernin), le SIZOV (Syndicat Intercommunal de la Zone Verte du Grésivaudan) dispose de sa propre station à Montbonnot.

 

1.2. Les inconvénients du système

L'absence de conception cohérente, l'extrême morcellement du réseau, fruit de l'histoire et de la volonté d'indépendance des communes de l'agglomération, sont sources de confusion administrative et de risques techniques. Ainsi :

La construction de la station Aquapole répondait à une nécessité ressentie de longue date. Elle a subi des contraintes fortes, liées à la structure du réseau, à la diversité des intervenants, aux conditions externes imposées par EDF. De toute évidence, il convenait dès les années 1980 de rationaliser l'assainissement de l'agglomération grenobloise. La station ne pouvait cependant pas résoudre à elle seule tous les problèmes du réseau (cf. point 6.2.).

 

 

2. La construction d'AQUAPOLE et les problèmes techniques de la station

2.1. Une construction rapide mais coûteuse

Au projet initial de plusieurs stations de petite dimension a finalement été préférée l'idée d'une station unique, en aval de Grenoble, baptisée Aquapole et installée au Fontanil, à côté de la première station, ayant vocation à intégrer les réseaux existants, donc à traiter la quasi totalité des effluents. La nécessité de cet ouvrage a été accrue par la construction du barrage EDF de "Isère moyenne aval".

La volonté du SIEPARG, dès l'élection de son nouveau président en 1983, a tendu vers une réalisation rapide de l'ouvrage, par le recours à un partenaire privé. Les étapes importantes du déroulement des travaux ont été les suivantes :

La capacité nominale de la station d'épuration est évaluée par l'Agence de l'Eau à 490 000 équivalents-habitants. Les 48 communes actuellement raccordées à Aquapole représentent une population quasiment équivalente à la capacité nominale. Au 31 décembre 1992 la "population" raccordée en pointe était en effet estimée à 480 000 EH dont 78 000 provenant d'industries.

Le coût global de l'ouvrage, évalué à partir des bilans financiers du concessionnaire (SDA, 1989-1995) et des décomptes définitifs établis par le maître d'oeuvre (cabinet d'études Marc MERLIN, mai 1992), s'établit à 471 millions de francs TTC soit 960 F par équivalents-habitants, montant supérieur au plafond admis par l'Agence de l'Eau (voir infra 3.4.).

 

2.2. Un ouvrage aux performances imparfaites

Alors que la DDE avait retenu l'hypothèse de 330 000 m3/jour, le cabinet-conseil a engagé le dimensionnement de la station sur la base de 226 000 m3/jour seulement. Or le volume d'eau traité par la station est en augmentation constante depuis 1989. Il a atteint 99,25 millions de m3 en 1994, soit une moyenne de 272 000 m3/jour. L'Agence de l'Eau a critiqué le dimensionnement retenu en soulevant deux problèmes techniques :

Elle estime d'autre part que la dilution anormale de l'effluent entraîne un abaissement des rendements épuratoires. Cette dilution, connue dès le départ, n'a jamais été maîtrisée.

 

2.2.1. La dilution anormale de l'effluent

La dilution des eaux usées reçues par Aquapole est très importante, puisque ramené à l'équivalents-habitants (rejet de 150 litres par jour), le volume de 272 000 m3/jour correspond à une capacité de 1,8 millions EH. La situation est aggravée par le fait que la station ne reçoit qu'une partie des eaux usées collectées. Le réseau est en effet équipé de déversoirs d'orage qui fonctionnent de plus en plus souvent quand les eaux sont diluées par le drainage des nappes phréatiques ou les eaux de pluie.

 

2.2.2. Le problème non résolu des eaux parasites

Le problème est intrusions d'eaux parasites dans le réseau d'assainissement de l'agglomération a bien été soulevé lors des études préliminaires relatives à la station, mais il semble avoir été ignoré par la suite, puisque aucune action systématique de réhabilitation du réseau n'a été menée en parallèle avec la construction de la station d'épuration, bien que cela eût été envisagé dans un premier temps. Une telle action est compliquée par la répartition des différentes maîtrises d'ouvrage à l'intérieur de l'agglomération, chaque commune ayant conservé la compétence pour son propre réseau. De plus le critère de répartition des charges étant la consommation d'eau potable (comme le prévoit la réglementation) et non pas le volume des eaux usées effectivement rejetées, les communes raccordées à Aquapole ne sont guère incitées à mener un effort particulier dans ce domaine.

A défaut d'une véritable étude diagnostic des réseaux, l'origine ou les causes des intrusions des eaux parasites et les débits à prendre en compte sont restés à l'état de suppositions qui diffèrent d'un document à l'autre. Pourtant, dès juillet 1985, l'Agence de l'Eau recommandait la "poursuite du programme d'étude des réseaux d'assainissement en vue de l'élimination des eaux parasites devant déboucher sur une programme de travaux et une échéancier prévisionnel". En fait, le problème des eaux parasites n'a jamais été traité comme il aurait convenu, et reste pendant. Les études en cours pour un nouveau schéma directeur ne devraient pas livrer de conclusions avant l'été 1997.

 

2.2.3. Conséquences

L'Agence de l'Eau évalue le taux de dépollution globale des effluents issus de la population et des industries raccordées à Aquapole à 43,5 % en ce qui concerne les matières en suspension (MST). Ce résultat médiocre est dû à la dilution anormale de l'effluent, et à l'importante intrusion d'eaux parasites dans le réseau signalées plus haut.

Le rendement de la station quant à lui est évalué par l'Agence de l'Eau à 82 %, toujours pour les MST. Ce taux est honorable, mais inférieur aux normes européennes (90 %) applicables dans un futur proche, soit en 2001, selon la transposition en droit français de la directive européenne du 21 mai 1991 (décret n° 94-469 du 3 juin 1994). Il est vrai que ce niveau d'exigence n'était pas connu au moment de la conception du projet.

 

 

3. La "concession contrôlée"

3.1. La mise au point du projet

3.1.1. Les objectifs initiaux

Ayant engagé dès la fin de l'année 1981 un programme d'études préalables, le SIEPARG avait initialement programmé sa station d'épuration pour l'horizon 1991, compte tenu notamment des possibilités de financement de l'ordre de 20 millions de francs par an d'investissements subventionnés, qui fixaient le rythme de réalisation du collecteur général vers le site de la station.

La décision en date du 16 novembre 1982 du ministère de l'environnement d'imposer que la station d'épuration de l'agglomération de Grenoble soit réalisée avant la mise en service du barrage de Saint-Egrève a conduit le SIEPARG à anticiper de trois ans l'achèvement de son programme initial et à envisager diverses possibilités de financement de l'ordre de 50 à 60 millions de francs pendant quatre années consécutives jusqu'en 1988. Dans une note de novembre 1983, la commission assainissement du SIEPARG étudie de façon précise quelle serait sur le prix du m3 d'eau l'incidence financière du programme des travaux estimés à 333,286 millions de francs, dont 225 millions de francs pour la station d'épuration. Selon cette note, le maximum annuel des dépenses d'investissement se produirait entre 1986 (61,7 millions de francs) et 1989 (45 millions de francs). En incluant les dépenses de fonctionnement, le maximum des annuités serait observé en 1991 et 1992 (50 millions de francs valeur 1982).

La commission assainissement propose alors deux solutions pour faire face au pointes de financement prévisibles en 1987-88-89 :

Un projet de chronogramme pour la réalisation d'Aquapole, initialement établi par le SIEPARG, envisageait un déroulement des études et des travaux d'avril 1984 à mars 1989 (réunion du 9 mars 1984 avec l'Agence de l'Eau).

 

3.1.2. Le passage à la formule de la "concession contrôlée"

Ce schéma a été ensuite abandonné par l'exécutif du SIEPARG, au profit de la formule de la concession afin, selon une note du 5 septembre 1984 remise à tous les membres de la commission assainissement, d'aller plus vite dans les procédures et d'obtenir un financement privé, évalué alors à 120 millions de francs pour un coût total de la station de 200 millions de francs, 80 millions de francs étant apportés par l'Agence de l'Eau sous forme d'avances et de subventions. Les 120 millions de francs seraient remboursés à partir de 1990, au moyen d'une augmentation progressive de la redevance assainissement.

Par délibération en date du 10 octobre 1984, le SIEPARG a entériné ces nouveaux objectifs et adopté le principe de la "concession contrôlée". Un groupe de travail a été mis en place, incluant le cabinet MERLIN qui recevait par ailleurs une mission d'assistance consistant à préparer les conventions de concession et de maîtrise d'oeuvre avant une date limite fixée au 10 février 1985 (cf. infra 5.1). Parallèlement les constructeurs pressentis étudiaient le projet de station d'épuration, la chaîne "eau" étant confiée à Degrémont et la chaîne "boues" à O.T.V. La convention de "concession contrôlée" a été signée le 26 avril 1985. Le calendrier des travaux annexé prévoyait un début des travaux de génie civil en février 1986 et une mise en service fin 1988.

 

3.1.3. L'impact financier

Le coût actualisé en valeur 1992 de l'investissement global envisagé par la note de novembre 1983 était de 463,671 millions de francs HT. La redevance d'assainissement aurait dans cette hypothèse été portée à 2,05 F/m3. Ce montant de 2,05 F/m3 est à rapprocher dun montant de la redevance correspondant à la solution de la concession finalement adoptée, soit 2,71 F/m3, comprenant la rémunération du concessionnaire (2,07 F HT/m3 en mars 1992) et la surtaxe du SIEPARG amortissant sa part de financement (0,64 F/m3).

Bien que l'objet des investissements ne soit pas identique dans les deux cas (collecteur et 1ère tranche de la station dans l'étude SIEPARG, station en deux branches dans la concession), les montants de travaux sont similaires. La solution de la concession ne s'est pas traduite par une économie pour l'usager, celui-ci devant ainsi supporter une redevance plus élevée : 2,71 F contre 2,05 F, soit un écart de 0,66 F/m3.

Ainsi, toute la réflexion préalable jusqu'au printemps 1984 au sein de la commission assainissement du SIEPARG a été abandonnée. Le choix de la concession a sans doute permis d'avancer de plus d'un an le début des travaux, en excluant toute mise en concurrence, à la fois au niveau des constructeurs et du maître d'oeuvre, alors que l'urgence technique n'était pas modifiée par rapport à la situation antérieure. La débudgétisation partielle affichée à ce stade n'entraînait pas pour autant un allégement des charges pour l'usager.

 

3.2. La convention

3.2.1. Durée et coût des travaux

Signée le 26 avril 1985 entre le SIEPARG d'une part, les sociétés O.T.V. et Degrémont d'autre part, ultérieurement réunies en une société en nom collectif sous l'appellation SDA (Société Dauphinoise d'Assainissement), la concession qualifiée de "contrôlée" (formule dépourvue de fondement juridique) retient un montant estimatif des travaux de 208 millions de francs HT pour la première tranche de la station d'épuration, réparti en 101 millions de francs pour le génie civil et 107 millions de francs pour l'équipement, les honoraires du maître d'oeuvre n'étant pas inclus.

La durée de la concession est fixée à 25 ans à compter de la mise en service de la station d'épuration (le 1er janvier 1989). Le concessionnaire établit les projets d'exécution, s'engage à assurer le renouvellement des matériels, finance les travaux de construction à hauteur de 100 millions de francs selon le calendrier suivant : 30 millions de francs au 2ème semestre 85 ; 30 millions de francs au 2ème semestre 87 ; 20 millions de francs au 1er semestre 88 ; 20 millions de francs au 2ème semestre 88.

Ainsi, sur un montant total des travaux de 208 millions de francs auquel il convient d'ajouter les honoraires du maître d'oeuvre (17 millions de francs), soit 225 millions de francs, la part du SIEPARG est de 35 millions de francs HT, à laquelle s'ajoute le financement apporté par l'Agence de l'Eau (90 millions de francs).

Ces dispositions sont différentes de celles présentées aux élus à la fin de 1984, selon lesquelles le SIEPARG ne devait apporter aucun financement propre. A l'inverse, la part du concessionnaire est limitée à 100 millions de francs, soi moins de la moitié du total.

 

3.2.2. Rémunération du concessionnaire

Elle est définie comme suit : partie fixe F'o = 20 F par semestre et par abonné assujetti + partie proportionnelle P'o = 1,14 F par m3 d'eau. Les valeurs F'o et P'o ont été déterminées sur la base de 80 000 abonnés et de 28 millions de m3 assujettis. Elles seront corrigées selon les valeurs réelles observées à la mise en service, puis périodiquement en appliquant une formule de révision des prix comportant un terme fixe de 12 % et des éléments indexés.

Selon le compte d'exploitation prévisionnel contenu dans l'annexe n° 3 de la convention, la rémunération annuelle du concessionnaire est de 35,12 millions de francs en valeur janvier 1985. Les dépenses annuelles d'exploitation sont estimées à 21,6 millions de francs La différence entre la rémunération et les dépenses courantes, soit 13,52 millions de francs, correspond d'une part à certaines charges : provisions pour irrécouvrables, financement du besoin en fonds de roulement, d'autre part à l'amortissement financier du concessionnaire et à la marge. La marge, confondue avec les charges de structure jusqu'en 1994 (cf. point 4.5 ci-après), ressortirait à 5 % des charges directes d'exploitation selon le compte rendu financier de 1995.

En raison de la faiblesse du terme fixe de la formule de révision de la rémunération retenue par le contrat de concession (12 %), la part des recettes destinée à couvrir les charges non courantes, l'amortissement et la marge devrait avoir tendance à augmenter proportionnellement plus vite, générant ainsi des profits croissants, quelle que soit l'évolution du chiffre des recettes. La tendance constatée au cours des premières années d'exploitation confirme cette hypothèse (cf. tableau en annexe 3). Sauf révision de la formule de base, non prévue en l'état de la convention, la marge devrait fortement augmenter au terme de l'amortissement financier supporté par le concessionnaire.

Ainsi dès le départ, l'intérêt réel de la concession doit être relativisé : contrairement au projet présenté, le délégataire ne doit plus financer la plus grande part de l'investissement, alors qu'une rémunération importante et croissante lui est assurée.

 

3.3. Les avenants

Depuis sa signature, la convention a été modifiée par dix avenants. Les neufs premiers sont intervenus entre les années 1985 et 1993 au fur et à mesure de la réalisation des études et des travaux. Présentés comme étant justifiés par de nouvelles charges assumées par le délégataire, ils accentuent encore les avantages qui lui sont consentis. En 1996, suite au changement d'équipe dirigeante, un 10 ème avenant a sensiblement modifié l'économie de la concession, au profit cette fois du concédant.

Les 9 premiers avenants ont tous pour conséquence, par glissements successifs, de réduire la participation effective du concessionnaire et d'accroître sa rémunération. Cette évolution apparaît dans les tableaux figurant en annexes 2 et 3 retraçant :

La participation du concessionnaire est ramenée de 100 à 80 millions de francs par l'avenant n° 2 du 4 août 1987, tandis que le SIEPARG doit contracter un emprunt de 50 millions de francs sur 20 ans dont l'annuité sera financée par une redevance annuelle versée par le concessionnaire.

Le financement apporté par le SIEPARG devient prépondérant pour la deuxième phase de la station d'épuration, prévue par l'avenant n° 4 du 15 février 1989. Sur un total de 119,7 millions de francs, la subvention de l'Agence de l'Eau représente 25,299 millions de francs, le financement du concessionnaire 20 millions de francs, et le financement du SIEPARG pour les travaux 74,401 millions de francs, soit près des deux tiers (62 %). Si l'on ajoute à la part du SIEPARG les honoraires du maître d'oeuvre, soit 6,575 millions de francs (montant retenu dans le rapport de la commission des aides de l'Agence de l'Eau du 4 octobre 1989), le capital apporté par le syndicat (81 millions de francs) est quatre fois supérieur à celui issu du concessionnaire (20 millions de francs), contrairement à l'une des motivations invoquées pour justifier le choix de la formule de la concession, qui consistait à obtenir un financement privé.

Il résulte du compte spécial soldé au 31 décembre 1993 que, pour l'ensemble de la station, le financement apporté par le concessionnaire est de 103,850 millions de francs et celui apporté par le SIEPARG de 292,228 millions de francs (incluant le montant des subventions de l'Agence de l'Eau).

Au total, alors que l'idée originelle consistait à faire assumer la totalité des investissements non pris en charge par l'Agence de l'Eau par le concessionnaire, on constate en fin d'opération que la part de financement de celui-ci n'a cessé de diminuer, et ne représente que 27,85 % du montant HT des travaux (hors honoraires de maîtrise d'oeuvre). Inversement, sa rémunération ne cesse d'augmenter par glissements successifs, pour atteindre 57,23 millions de francs (valeur décembre 1988) dans l'avenant n° 9.

 

3.4. L'évolution de la dépense subventionnable

Le SIEPARG a signé avec l'Agence de l'Eau quatre conventions d'aide financière en ce qui concerne la station d'épuration Aquapole : les 13 novembre 1985, 7 avril 1988, 30 novembre 1989 et 23 décembre 1991. Ces conventions ont été préparées après un examen de la commission des aides du conseil d'administration de l'Agence de l'Eau, donnant lieu chacune à rapport (non public), dont on n'a retenu que les éléments les plus significatifs.

 

3.4.1. 1ère phase "physico-chimique"

Selon le premier rapport du 2 juillet 1985, le coût de l'opération présenté par le SIEPARG s'établit à 236 532 000 F (valeur juin 1985). Sur la base d'une capacité nominale évaluée par l'Agence de l'Eau à 490 000 EH, le coût moyen ressort à 236 532 000 / 490 000 = 482,72 F HT / EH. Ce coût est nettement supérieur au coût plafond retenu par l'Agence pour une station de traitement physico-chimique qui est de 349,60 F/EH. L'Agence note cependant que ce coût englobe des travaux exceptionnels estimés à 18,790 millions de francs HT (valeur juin 1985) ; "le coût de la station hors travaux exceptionnels ressort donc à : 236,532 - 18,790 = 217,742 F soit 444 F/EH (encore supérieur au coût plafond Agence)".

On notera qu'au montant de base des travaux de 208 millions de francs HT viendront s'ajouter des travaux supplémentaires de 30,